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Bilan (1/2) : Les États-Unis au top, l’Europe en forme, l’Afrique en quête de progrès

La 8e édition de la Coupe du monde féminine s’est achevée comme la précédente : par un succès des États-Unis en finale. Équipe la plus sacrée de la compétition avec désormais quatre victoires, la sélection entraînée par Jill Ellis a su garder la tête froide dans les moments de doute. Parfois bousculée par l’Espagne (8e), la France (quart) ou l’Angleterre (demi-finale), l’USWNT a prouvé sa force collective en s’imposant à chaque fois dans le temps réglementaire.


Un règne américain qui se poursuit


Après avoir largement dominé leur sujet en phase de groupe, les Américaines sont passées dans une approche d’adaptation par rapport à leurs adversaires. Elles n’ont pas hésité ainsi à laisser la possession, comme face à la France (39%) pour parvenir à ses objectifs. Dans ces cas-là, la défense bien organisée et l’entrejeu généreux en efforts font la différence, tout comme l’efficacité offensive, à l’image d’une Megan Rapinoe sans pitié dans la zone de vérité (six buts pour douze tirs). Jean-Luc Vasseur, nouvel entraîneur de l’OL féminin, soulignait ces aspects multiples de cette équipe dans France Football. "Par le niveau d'intensité, par la pression qu'elles mettent, ce sont des qualités essentielles. Elles ont un espèce d'état d'esprit de conquérantes et de vainqueures bien propres à elles même." Capable de passer à cinq derrière, comme face à la France, l'USWNT a été en permanence dans la mesure de répondre aux défis adverses.

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Parfois taxées d’arrogantes par leurs adversaires et les observateurs, les Américaines ont surtout su compter sur elles-mêmes, en dépit d’un contexte délicat avec le conflit ouvert entre Rapinoe et Trump mais aussi la question des inégalités salariales avec leur fédération. Jill Ellis, reconnue pour son talent de diplomate, n’a pas été perturbée au moment de mettre tout le monde dans le même sens avec cette première dans l’histoire du football féminin : conserver sa couronne mondiale. "Elles ont montré une résilience fantastique, une alchimie.... Elles ont mis leur coeur et leur âme dans cette aventure. Je ne peux pas les remercier assez, c'est fantastique", a souligné la coach de 52 ans, qui est elle aussi rentrée dans l’histoire. Logiquement, cinq joueuses de cette sélection ont été retenues dans notre équipe-type du tournoi.

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La hiérarchie bousculée en Europe


Avec sept équipes sur huit issues en quart de finale, une première dans l’histoire, le Vieux Continent s’est très bien comporté même s’il n’y a pas eu la victoire au bout. Mieux structurées à travers leurs championnats et leurs fédérations, les sélections européennes ont su saisir leur chance dans ce tournoi, avec un finaliste surprenant. Les Pays-Bas ont apporté un certain vent de fraîcheur, portés tout le long de ce Mondial par des supporters présents en nombre en France. Si la marche était trop haute pour Lieke Martens et ses coéquipières en finale, elles ont été dans la continuité de leur succès à l'Euro 2017. Attendues au tournant mondial pour cette 8e édition, elles n'ont pas déçu et possèdent encore une marge de progression intéressante pour venir challenger un peu plus les Américaines.  À un autre niveau, l’Angleterre de Phil Neville a aussi su séduire. Son football posé qui cherche des solutions au sol plutôt que dans les airs a fonctionné jusque dans le dernier carré. Les progrès observés doivent désormais se prolonger dans le temps.

Phil Neville Jill Scott England 2019

Les pays latins ont aussi été de la partie avec des belles performances pour l’Espagne (8e de finaliste) et l’Italie. Cette dernière a suscité un bel engouement dans un pays jusque-là indifférent vis-à-vis de ses performances. "L'équipe m'a surpris dans le sens où elle a montré un football qui ressemble à celui des Italiens chez les garçons. Une capacité à bien défendre, à se projeter vite vers l'avant, avec beaucoup de mouvement et d'appels en phase d’attaque.", notait Yannick Chandioux, entraîneur de Dijon, toujours dans FF. Où placer les Bleues alors dans ce baromètre ? Les joueuses de Corinne Diacre visaient le titre final mais ont échoué dans les moments cruciaux. Leur parcours a été en dents de scie malgré la volonté de tout donner physiquement. Néanmoins, par leur manque de réalisme, elles ont été punies, même dans leurs temps forts. Privées de Jeux Olympiques à Tokyo en 2020, la reconstruction va prendre du temps d’ici deux ans et l’Euro en Angleterre.

Au rang des déceptions, l'Allemagne d'Alexandra Popp est aussi bien présente. Dépassée par la Suède en quart de finale (1-2), la Mannschaft était impériale jusque-là avec quatre victoires et autant de clean-sheets. Après un règne sans partage sur l'Europe, avec six titres consécutifs de 1995 à 2013, les joueuses de Martina Voss-Tecklenburg étaient déjà passées à côté d'un rendez-vous déterminant, suite à l'échec lors de l'Euro aux Pays-Bas. La meilleure espoir du tournoi, Giulia Gwinn, n'aura pas suffi. "Je pense que le chemin qu'on a pris il y'a un an on doit le poursuivre, affirmait la sélectionneure allemande. Les changements ne vont pas avoir un effet du jour au lendemain, on analyse toujours les choses de façon critiques avec les clubs, comment nos joueuses potentielles maintenant vont se développer, je sais que nous avons des talents en Allemagne, ce n'est pas parce qu'on a perdu un match qu'il faut tout remettre en question."


L'Afrique entre espoirs et doutes


Si le Nigeria et le Cameroun ont rejoint la phase à élimination directe, contrairement à l'Afrique du Sud, leur tournoi a été bien paradoxal. Il y a eu l'immense satisfaction pour ces équipes encore en phase de développement de faire partie de l'élite mondiale, tout en s'estimant lésées par l'arbitrage. Les Super Eagles ont vécu un drôle d'épisode à Rennes avec le penalty à retirer en faveur des Bleues et de Wendie Renard. Le Cameroun, opposé à l'Angleterre en 8e de finale, a voulu arrêter sa rencontre pour protester face à une supposée géométrie variable du VAR. Dans le fond, il y a des éléments à redire sur cette absence de pédagogie arbitrale mais les sélections africaines ont montré un visage inégal dans ce tournoi. Le Nigeria a démontré que ses capacités physiques étaient de vraies armes pour imposer des difficultés aux adversaires. De son côté, le Cameroun d'Alain Djeumfa a été séduisant sur certaines séquences, avec son lot de suspens. Des motifs d'espoir pour l'avenir.

Nigeria women, Super FalconsGetty

Ailleurs, les sélections en position d’outsiders n’ont pas été en réussite. Le Canada de l’iconique Christine Sinclair était en fin de cycle et n’est pas parvenu à suffisamment se renouveler. Ce constat s’applique aussi au finaliste sortant, le Japon, qui malgré sa volonté de bien ressortir, a été régulièrement sans solution, à l’image de son premier match face au petit poucet argentin (0-0). La Chine aussi a été confrontée à certaines problématiques et n’a plus les ressources pour atteindre le top niveau mondial. Le gouvernement a promis des investissements massifs pour changer cette tendance. Cela sera à suivre de près dans les années à venir.

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