Pour conquérir la Ligue des Champions, le PSG doit veiller à réinstaurer la paix en son sein et siffler la fin du bras de fer entre Luis Enrique et Mbappé

Quelle mouche a-t-elle bien pu piquer Luis Enrique pour qu’il décide du jour au lendemain à enlever tout privilège à Mbappé et lui faire subir à chaque fois l’humiliation d’une sortie avant le coup de sifflet final alors que son équipe est en souffrance ? En réalité, ce n’est pas subitement qu’il a commencé à opérer ainsi mais depuis que le joueur a fait part de son intention de changer de tunique lors du prochain mercato. Difficile de ne pas y avoir un quelconque rapport.

Le technicien asturien répète à qui veut l’entendre que ce choix est uniquement sportif, et qu’il est dicté par sa volonté de préparer déjà la saison prochaine. « Car tôt ou tard, il faudra apprendre à jouer sans lui », s’est-il justifié. Un discours difficilement audible. S’il est vrai que tout ne doit pas se reposer sur un seul joueur, il parait difficilement concevable qu’un entraineur pense à la saison à venir dès le mois de février. D’ailleurs, qu’est-ce qui lui assure qu’il sera toujours en poste à ce moment-là ? N’est-ce pas une forme d’arrogance ? C'est d'ailleurs ce qu'a déploré Christophe Dugarry lundi soir sur RMC.

L’attitude de Luis Enrique est d’autant plus étonnante qu’elle contraste complètement avec la manière dont il gérait Mbappé jusqu’au mois de février. Il lui pardonnait tout et assurait même à qui voulait l’entendre qu’il était libre de choisir sa position sur le terrain. De quoi se demander si c’est vraiment de son propre chef qu’il a opéré ce virage à 180°.

Si l’ancien coach du Barça a fait le choix de tourner le dos à Mbappé c’est assurément parce que sa direction lui a sommé de le faire. Ou alors, elle lui a simplement précisé qu’il était désormais libre d’opérer comme il le voulait sans tenir compte du statut de l’international français. Si tel est le cas, il y a aussi de quoi être scandalisé. Car cela voulait dire que son discours d’avant n’était que de façade et que s’il gardait Mbappé sur la pelouse constamment c’est parce qu’il y était forcé.

En tout état de cause, le board parisien a donné son assentiment dans cette affaire. D’après les révélations faites par L’Equipe, il encouragerait même la mise au ban de Mbappé car il accepterait mal le fait qu’il lui ait dit non à une prolongation. Une réaction d’orgueil difficilement compréhensible, car ce n’est pas comme si leur star n’avait pas prolongé en 2022 en déclinant à l’époque les faveurs du Real Madrid.

Même s’il a diné avec lui il n’y a pas si longtemps à l’Elysée, Nasser Al-Khelaifi a donc choisi une séparation avec fracas avec le joueur le plus efficace de l’ère QSI, et qui plus est le meilleur buteur de l’histoire du club. Ce n’est pas très élégant, même s’il convient d’admettre qu’on ne sait pas tout ce qui s’est passé en interne. Un divorce dans les meilleures conditions promis par les deux camps en septembre dernier, suite à la mise à l’écart du champion du monde 2018, n’était manifestement qu’une illusion.

Comme tout grand footballeur qui se respecte, Mbappé a aussi un égo. Et s’il pouvait fermer les yeux sur le fait de pouvoir sortir une fois de temps en temps durant la dernière demi-heure d’un match de championnat déjà scellé, il lui était difficile de rester sans réaction contre un remplacement dès la pause du match suivant. La façon dont il s’est comporté dans la foulée peut paraitre excessive mais c’était une manière d’exprimer son mécontentement. En rejoignant sa famille en tribune plutôt que de rasseoir avec ses coéquipiers sur le banc, il a signifié à sa hiérarchie qu’il en avait ras-le-bol de cet acharnement.

Il n’y a pas non plus eu mort d’homme. Et on préfère un joueur qui fasse passer un message de cette façon, plutôt qu’en boudant ou en manquant une séance d’entrainement. Comme par exemple Lionel Messi a pu le faire à Barcelone après avoir été laissé sur le banc par... Luis Enrique.

Le Bondynois sait où sont ses limites. Et on le voit mal aller au clash et ternir ainsi la fin de son histoire avec Paris. Il ne l’avait pas fait l’été dernier lorsqu’il s’est retrouvé en marge du groupe, pourquoi le ferait-il aujourd’hui alors qu’il ne lui reste plus quelques mois à tirer dans la capitale ? La ligne rouge ne sera donc pas franchie, même si on ne peut jurer de rien.

Il est donc difficile que cette affaire aboutisse à un clash ouvert. Pour autant, il ne serait pas intelligent du tout de laisser la situation en l’état. Car le PSG a encore des objectifs à accomplir. Si le championnat parait plié, la Coupe de France et surtout la Ligue des Champions sont encore loin d’être conquises. Et on voit mal l’équipe francilienne signer un triplé en se passant de Mbappé ou en faisant en sorte qu’il ne soit pas tout à fait heureux pour ces derniers mois au club.

Tous les clubs qui ont conquis le plus beau des trophées européens ont fait en sorte qu’il n’y ait pas de parasites en interne sur la route de la gloire. On peut notamment citer le précédent Nicolas Anelka en 2000. L’enfant terrible du football français avait manqué de respect à l’institution à l’entame de la seconde partie de l’exercice. Il a été suspendu dans la foulée. Mais tout est rentré dans l’ordre lors de la dernière ligne droite de la campagne. Et l’ancien international tricolore s’est même révélé être décisif en demi-finale de l’épreuve face au Bayern.

Aux dirigeants parisiens d’en prendre de la graine et s’atteler à ce que la situation ne s’envenime pas. Autrement, il n’y aura pas de gagnant dans l’histoire. Et surtout, le premier perdant ça sera bien le club et non le joueur.

Apparemment, il y a bien une prise de conscience de la part des intéressés. Dès samedi, Luis Enrique et Kylian Mbappé se sont entretenus et ont essayé de régler leur différend. Une information de Le Parisien a laissé entendre que leurs « rapports se sont réchauffés ». On s’est résolus à repartir sur de bonnes bases, en étant notamment plus dans le dialogue, la sincérité et un investissement sans faille. En d’autres termes, on revient aux préceptes qui doivent régner dans tous les grands clubs et dans la relation entre tout grand coach et grand joueur.

Il faudra bien sûr attendre pour constater que ce ne sont pas que des paroles en l’air. Et le match de ce mardi soir apportera clairement des réponses à ce sujet. Néanmoins, et c’est assurément le cas à plus forte raison de tout supporter du PSG, on a envie de croire que la sagesse et l’intérêt commun va l’emporter sur cette bataille d’égos totalement absurde et sans aucun profit général.