PSG Basaksehir Champions LeagueGetty

PSG-Basaksehir : récit d'une soirée à la fois triste et symbolique

Il est 23h30 quand les bus de Basaksehir et du PSG quittent le Parc des Princes. Avec à leur bord, les joueurs et le staff des deux équipes. Cette fois, ça ne fait aucun doute. La soirée est terminée. Les joueurs ont rangé les crampons au fond de leur sac. Ils ne reprendront pas le match, et c'est une ambiance presque irréelle qui règne aux abords du stade où une poignée de journalistes s'est ruée pour filmer l'image d'un départ tellement symbolique.

L'épilogue était pressenti. Après deux heures d'attente dans un froid glacial, l'UEFA a fini par annoncer le report de la rencontre. Un choix respectable et respecté. Tard mardi soir, le PSG a d'ailleurs exprimé son soutien à Basaksehir, et à Pierre Webo, l'adjoint d'Okan Buruk qui aurait été victime d'insultes racistes de la part du quatrième arbitre, Sebastian Coltescu : "C’est un fait extra-sportif qui a mis un terme à cette rencontre après tout juste 13 minutes de jeu. Une plainte dans les rangs turcs suite à des propos racistes émanant du 4e arbitre a laissé place à un vif échange qui a réuni les 22 acteurs aux bords du terrain. Toute forme de racisme va à l’encontre des valeurs véhiculées par le Paris Saint-Germain, son Président, son staff et ses joueurs", écrit le club parisien dans son communiqué.

"Why you said negro ?"

L'altercation démarre à 21h13. Presnel Kimpembe échappe au carton jaune pour un tacle sur Fredrik Gulbrandsen. Une décision qui ne fait pas l'unanimité sur le banc de Basaksehir. Sebastian Coltescu réagit alors, et utilise le terme "negru" en roumain ("noir") pour désigner l'homme qu'il estime être à l'origine de la contestation, à savoir Pierre Webo. Ce dernier a entendu le mot employé. Il se lève pour descendre les marches et exprimer sa colère. "Why you said negro ? Why you said negro ?" L'ancien international camerounais lance un cri du coeur et doit être stoppé par les autres membres du staff pour ne pas se retrouver nez à nez avec son supposé agresseur.

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La confrontation est évitée, mais la tension est forte. Neymar vient échanger avec le coach Okan Buruk. Il est suivi par plusieurs de ses coéquipiers. Les joueurs turcs sont là également. Du haut de la tribune de presse, c'est l'incompréhension. Chacun se penche sur son écran le plus proche pour s'assurer de ce qui s'est réellement passé. Les coups de téléphone s'enchaînent pour savoir si oui non le quatrième arbitre a tenu des propos racistes à l'encontre de Webo. Thomas Tuchel, lui, ne cesse de bouger dans tous les sens. Dans son espace, devant son banc, il semble ne pas comprendre ce qui se passe. Marquinhos vient lui parler.

La scène dure presque dix minutes. Sebastian Coltescu se lance dans une explication pour justifier ses propos. C'est là que Demba Ba sort de sa réserve. Très remonté, l'attaquant, pour qui l'insulte raciste semble ne faire aucun doute, réclame des explications et appelle ses partenaires à revenir vers le banc de touche. Kylian Mbappé n'est pas très loin. Presnel Kimpembe non plus. Les deux internationaux français ont le regard dépité. Le dernier cité vient même d'appeler ses coéquipiers à quitter le terrain. Chose qui finira par se passer lorsqu'à 21h24, l'arbitre renvoie l'ensemble des joueurs aux vestaires.

Pendant près d'une heure et demi, les Parisiens se sont tenus prêts à revenir. On a pu les voir s'échauffer, à un moment donné, dans le couloir menant au terrain. Les membres du staff ont posé les coupelles sur la pelouse, laissant penser que cela pourrait reprendre. Mais au fil du temps, les signaux ont semblé tendre vers un arrêt définitif du match, comme lorsque les intendants du PSG, aux alentours de 22h40, sont arrivés sur le banc pour ranger le matériel. C'était plié.

L'UEFA a décidé que le match se jouerait ce mercredi à 18h55 au Parc des Princes. Il devrait reprendre à la 13e minute. Là où il s'est arrêté. Mais plus qu'un arrêt de match, c'est un acte fort dans la lutte contre le racisme qui aura marqué cette soirée inédite. On retiendra les prises de parole des personnalités politiques comme le président turc Recep Tayyip Erdogan, ou encore la ministre déléguée en charge des sports en France Roxana Maracineanu, qui a parlé d'une "décision historique" et qui a salué "la symbolique forte" du geste de ces athlètes, et leur solidarité face à un acte qu'ils ont jugé inacceptable. 

Une "enquête approfondie" sera ouverte par l'UEFA qui a déjà acté le remplacement des quatre membres du corps arbitral pour le match de mercredi.

Benjamin Quarez, au Parc des Princes.

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