Houssem Aouar AlgeriaGetty

Passé du bleu au vert, Houssem Aouar est-il le meneur qu’attend tant l’Algérie

Dans environ trois mois, l’équipe nationale algérienne va partir à la conquête de sa troisième étoile. Après leur sacre de 2019 en Egypte et désastre de 2022 au Cameroun, les Verts sont gonflés à bloc pour retrouver le sommet du continent même si ce n’est pas l’objectif qu’ils énoncent publiquement. Ils ont des ambitions et pour les faire fructifier ils vont s’appuyer notamment sur un joueur passé par l’équipe de France, en la personne de Houssem Aouar.

L’Algérie, pas un choix par défaut pour Aouar

En 2020, le joueur formé de l’OL était convoqué par Didier Deschamps pour disputer un match amical avec les Bleus (contre l’Ukraine). C’était sa seule et unique apparition avec le maillot frappé du Coq. Ignoré ensuite par le patron tricolore, à juste titre certainement en raison d’une baisse de rendement évidente avec son club, Aouar a fini par se résoudre de changer de nationalité sportive. Il a troqué la tunique bleue pour la verte, clamant au passage que ce n’était pas un « choix par défaut ». On n’est pas obligé de le croire sur ce point, mais son attachement envers le pays de ses parents ne peut être contesté. Contrairement à un Andy Delort, s’il s’est tourné vers l’Algérie ce n’est pas par opportunisme. Ou alors pas exclusivement. Tout ramène le natif de Lyon à cette nation, à commencer par sa culture, son éducation et son entourage.

Ce préambule posé, il convient désormais de se demander si la présence d’Aouar constitue une valeur ajoutée pour les Fennecs. Sur ses deux premières capes, honorées en juin dernier et les deux fois comme remplaçant, il était difficile de se faire une idée vu le maigre temps de jeu qu’il a eu. Et lors du rassemblement de septembre, le néo Romain n’était pas présent car blessé.

Retenu pour les matches contre le Cap-Vert et l’Egypte, programmés en ce mois d’octobre, Aouar va donc avoir une belle carte à jouer. A trois mois du début de la Coupe d’Afrique des Nations en Côte d’Ivoire, il est tenu de gagner sa place et montrer qu’il peut apporter un plus à cette équipe. Au regard de ses qualités intrinsèques, de sa position sur le terrain et aussi de la motivation qui l’anime, il est permis de croire qu’il pourra réussir dans cette entreprise. Et c’est ce qu’espèrent aujourd’hui tous les supporters algériens.

Le meneur de jeu qu’attend tant l’Algérie ?

La convocation d’Aouar avait d’abord fait beaucoup jaser auprès de l’opinion publique locale. Il y a eu une division entre ceux qui se félicitaient de l’arrivée d’un élément de qualité et ceux qui rebutaient l’idée qu’un joueur aligné avec une autre sélection puisse se rabattre sur l’Algérie comme une solution de secours, aujourd’hui tout le monde parmi les suiveurs d’ « El Khedra » est unanime pour dire qu’il est très intéressant de l’avoir dans son camp. D’autant plus qu’il a un profil particulier, à même d’apporter de nouvelles options à Djamel Belmadi.

La position préférentielle d’Aouar sur le terrain est celle d’un milieu axial. Cela tombe bien car cela fait un bon moment que l’Algérie n’a pas eu un joueur créatif dans ce registre, que ça soit en tant que meneur de jeu ou milieu de terrain avancé. Evoluant la plupart du temps dans un système en 4-4-2 voire en 4-3-3, l’équipe maghrébine ne se souciait plus trop de posséder un 10 à l’ancienne en son sein. Il faudrait peut-être même remonter à l’époque de Christian Gourcuff (2015-2017) pour retrouver la trace d’un joueur évoluant dans une configuration similaire (Yacine Brahimi).

Ceux qui ont succédé au coach breton ont misé sur d’autres options. Et on peut imaginer que c’était aussi par la force des choses car il n’y avait pas de talents à même de donner satisfaction dans cette position. Ce qui peut être considéré comme une aberration pour une nation connue pour la « technicité » de ses footballeurs. Une nation qui a aussi enfanté des génies comme Lakhdar Belloumi et qui a pu profiter de la maestria d’un Moussa Saib ou d’un Mourad Meghni.

Houssem Aouar Algeriafaf.dz

« Aouar ne pourra pas se désintéresser du travail défensif »

Alors serait-ce illusoire d’espérer qu’Aouar puisse un peu ressusciter ce rôle au sein de la sélection algérienne ? GOAL a posé la question à Bilal Dziri, l’ancien international algérien (81 capes), qui a lui-même occupé ponctuellement cette position sur le terrain. « Est-ce qu’Aouar peut être aligné comme un meneur ? Je pense que c’est plus un milieu relayeur. A Lyon, il était obligé d’abattre un travail défensif, et il le fait aussi à la Roma avec le très exigeant Mourinho. Avant les 10 ne le faisaient pas (ne défendaient pas, ndlr). Aujourd’hui, il faut s’adapter à ce que veut l’entraineur. Et il n’est pas dit que Belmadi l’utilisera dans ce rôle », a confié l’ex-Fennec.

De manière globale, Dziri doute qu’on puisse revoir un 10 à l’ancienne au sein des Verts. « Dans les années 80, en sélection algérienne ou en clubs, il y avait toujours un milieu axial. Mais le numéro 10, celui qui joue derrière l’attaquant, il a eu un peu disparu depuis cette époque-là. Un peu comme les stoppeurs ou les libéros. Les dispositifs tactiques ont évolué. Aujourd’hui, on a des milieux récupérateurs et relayeurs. Chaque période a ses tendances, avec une révolution tactique qui s’opère. Le football change constamment ».

Pour l’ancien joueur de Sedan, si sa sélection a un peu snobé ce qui la caractérisait par le passé c’est un peu pour être en conformité avec les exigences tactiques du moment. Et aussi parce que le côté spectacle est désormais relégué au second plan. « Je ne vais comparer les époques, mais aujourd’hui, en sélection, on ne peut pas trop miser sur le football champagne, car il faut avoir des résultats immédiatement. A chaque phase de qualification succède une autre phase de qualification et t’es même obligé de performer lors des matches amicaux. C’est l’époque qui veut ça. Il faut d’abord avoir des bases solides, ce qui revient à bien défendre. De plus, en sélection on n’a pas trop le temps de travailler l’aspect tactique. Si ce n’est avant les grands tournois ».

Aouar n’a plus de temps à perdre

Ce jeudi, on saura si Belmadi compte accorder ou pas à Aouar les clés de jeu son équipe. S’il l’utilise comme un numéro 10 ou pas. Mais, quoi qu’il en soit, pour répondre aux attentes, l’intéressé devrait déjà retrouver son meilleur niveau. Celui derrière lequel il court depuis le Final 8 de la Ligue des Champions 2019/2020. Là où il avait crevé l’écran avec ses différences dans le jeu, martyrisant les défenses de la Juventus et de Manchester City. Depuis, et en raison notamment d’un physique fragile, il n’a pas été en mesure de s’exprimer comme il sait le faire.

Transféré à la Roma l’été dernier après une fin d’histoire compliquée avec Lyon, Aouar éprouve quelques difficultés à bien s’adapter au championnat italien. Ce n’est pas vraiment inquiétant, mais avec un coach aussi exigeant que José Mourinho il vaut mieux ne pas trop trainer en route. Classé à la 65e place seulement des milieux de terrain aux meilleurs ratios de passes réussies en Serie A (80%) et avec seulement un taux de réussite en dribbles qui ne dépasse pas les 25%, il n’a clairement pas attaqué cette nouvelle aventure par le bon bout. A lui de rectifier le tir rapidement. Des prestations réussies avec l’Algérie ces prochains jours ne pourraient que le requinquer dans cette optique.

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