Paul Pogbagetty

Coupe du Monde - Paul Pogba : entre 2014 et 2018, un patron est né

"Recevoir ce trophée du meilleur jeune joueur est une grande fierté. Je pense à toutes ces années de travail et je me sens récompensé. Jouer la Coupe du monde était déjà un rêve, gagner ce trophée en est un autre. Mon prochain rêve serait d’être le meilleur joueur de la Coupe du Monde", voici des mots qui pourraient être ceux de Kylian Mbappé, récompensé du titre de meilleur jeune joueur du Mondial 2018 dimanche soir, fort de ses 4 buts inscrits dans la compétition.

Pourtant, ce sont ceux d'un certain Paul Pogba, qui avait reçu le même trophée au Brésil 4 ans auparavant, à l'époque durant laquelle il n'avait même pas osé faire part d'un rêve encore supérieur : celui de remporter la compétition. Quatre ans plus tard, Paul Pogba est toujours un jeune joueur, lui qui a fêté ses 25 ans le 15 mars dernier. Mais un jeune joueur Champion du Monde, auréolé d'un but inscrit du pied gauche en finale. Pire, il aurait aisément pu prétendre au titre de meilleur joueur de la compétition, au même titre que certains de ses coéquipiers d'ailleurs, si Luka Modric n'avait pas placé la barre trop haute. 

Adil Rami : "Je ne sais pas comment mais Paul Pogba est devenu un leader"

"Je suis prêt à tout donner pour l'Equipe de France. Etre un leader, pourquoi pas. Après, je ne pense pas que tu puisses le dire, ça vient automatiquement, naturellement. On veut la gagner, donc si je dois booster tout le monde, je vais le faire", déclarait Paul Pogba en conférence de presse avant d'affronter le Danemark, ignorant encore ce qui l'attendait près de trois semaines plus tard.

Mais, finalement, être un leader, qu'est-ce que c'est ? Sur le terrain, avoir été le joueur français ayant tenté (104) et réussi (78) le plus de passes dans les 30 derniers mètres en Russie y ressemble, par exemple. De même qu'avoir été le milieu de terrain ayant remporté le plus de duels dans cette Coupe du Monde 2018 (58). En dehors, son omniprésence dans les vestiaires avant les différentes rencontres - révélée au grand jour par les images du documentaire de TF1 "Les Bleus 2018 : au cœur de l'épopée russe", diffusé mardi soir - marquée par des discours taille patron, ne laisse que très peu de place au doute.

"Il n'y a plus de marche arrière. C'est mort. On va continuer, on va aller jusqu'au bout. On se donne rendez-vous le 15 juillet. Tous ensemble. Tous ensemble. Aujourd'hui Blaise il est sur le banc, il est dégoûté, il a envie de jouer plus que tout le monde. C'est pour des mecs comme ça qu'on va se battre aujourd'hui. On va se battre pour son partenaire. Comme on l'a fait en Argentine, toujours plus. On doit battre les meilleurs pour être les meilleurs", déclarait-il avant le quart de finale face à l'Uruguay dans lequel il avait été brillant. Des discours prononcés dans un silence assourdissant permettant de solidariser et de galvaniser les troupes, un peu à la manière d'un Patrice Evra, pouvant être considéré comme son mentor, qui ont visiblement fait effet chez ses partenaires.

"Je ne sais pas comment mais Paul Pogba est devenu un leader (...) Paul Pogba s’est battu défensivement pour l’équipe et je peux vous dire qu’il est devenu un leader. Il avait ça en lui, c’est lui qui a montré le chemin", affirme par exemple Adil Rami, l'un des doyens du groupe. Enfin, de nombreux détails, qui en réalité n'en sont pas, ont témoigné de l'envergure prise par Paul Pogba en Russie, comme quand ce dernier n'a été autre que le seul à être allé taper dans les mains de tous ses partenaires avant le coup d'envoi de la finale.

Conforté par le changement de système, le moment opportun pour s'affirmer

Et pour cause, s'il a désormais pris la mesure de ses nombreuses qualités, Paul Pogba a surtout pu profiter d'un changement de système permettant au mieux de les exploiter. En effet, la totale assimiliation de son nouveau rôle de double pivot dans son association avec N'Golo Kanté, a permis de lui donner un rôle clé dans le projet de jeu instauré par Didier Deschamps, basé dans un premier temps sur la récupération du ballon avant de, dans un second temps, faire admirer sa qualité de passes et de jeu long, profitant notamment à la flèche Kylian Mbappé.

Un changement de rôle qui a fonctionné à merveille durant cette Coupe du Monde, à l'image de l'action de son but inscrit en finale face à la Croatie, dans laquelle il fait d'abord office de rampe de lancement pour son jeune coéquipier parti à grande vitesse sur son côté droit. Autrement dit, ses coups de génie, parfois peu utiles car trop isolés, ne servent enfin qu'à servir au mieux l'intérêt collectif, si bien que c'est presque dans un rôle de l'ombre que le joueur formé au Havre parvient à briller, dictant le rythme d'une Equipe de France résolument rigoureuse tactiquement. 

Finalement, ce n'est donc peut-être pas un hasard si le joueur qui compte déjà 60 sélections chez les Bleus a été l'auteur du 3ème but tricolore face à la Croatie, celui qui a permis de faire basuler la rencontre en faveur d'une équipe qui n'était que trop peu en sécurité avec son seul but d'écart. D'autant qu'en matière de football, on a l'habitude de dire que les grands joueurs sont ceux qui répondent présents dans les grands rendez-vous. Cela tombe plutôt bien, le joueur de Manchester United n'est autre que le seul joueur français a avoir marqué dans 3 tournois majeurs (Mondial 2014, Euro 2016 et Mondial 2018) depuis un certain Thierry Henry (5).

Paul Pogbagetty

En Russie, la France a donc vu naître le meneur qu'elle espérait tant trouver durant cette Coupe du Monde. Cela a simplement pris un petit peu plus de temps que prévu. Mais comme l'indiquait à juste titre un autre meneur en la personne d'Hugo Lloris en conférence de presse avant la rencontre face à Uruguay, Paul Pogba a choisi un moment opportun pour s'affirmer. "Il prend de la place dans le vestiaire et c’est une bonne chose. Il a énormément de talent et beaucoup à donner à ses coéquipiers. Les grandes compétitions servent à se révéler en tant que joueur et en tant qu’homme et c’est certainement ce qui arrive à Paul", avait alors déclaré le capitaine de l'Equipe de France, donnant l'impression d'avoir eu vent de ce qui allait se produire lors d'une compétition terminée en apothéose. 

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