Messi n'a pas été Messi lors de la Copa America et l'Argentine ne peut triompher sans une grande finale de sa part

Ce match contre l'Équateur a sans doute été l'un des pires de Messi sous le maillot argentin depuis des années. Les statistiques, prises isolément, font froid dans le dos. Le capitaine argentin a touché le ballon 29 fois, effectué 21 passes, tiré une fois et n'a pas dribblé un seul adversaire. Le maitre à jouer de l'Albiceleste a été réduit à un rôle de figurant.

Le mérite en revient en partie à l'Équateur. Moises Caicedo - si décevant avec Chelsea la saison dernière - a parfaitement muselé La Pulga. Il avait à peine le temps de respirer. Lorsque l'Argentin essayait de s'avancer vers le but adverse, Caicedo l'a toujours suivi. Et quand il était pris, quelqu'un d'autre intervenait. Le seul véritable moyen d'arrêter Messi est de l'étouffer. C'est ce qu'a fait l'Équateur.

L'Argentine devait donc se tourner vers d'autres éléments pour faire la différence. Lisandro Martinez a endossé le costume du héros en marquant le seul but et l'Albiceleste a encore été excellente aux tirs au but.

Dans tout cela, cependant, il y a une réelle inquiétude que Messi ne soit pas tout à fait en forme. On peut dire qu'il ne l'a pas été depuis près de deux ans. Nous parlons d'un joueur de 37 ans, après tout. Messi a joué presque chaque minute de la Coupe du monde 2022 et a remporté le trophée qu'il convoitait tant en guise de récompense.

Mais depuis, il n'a cessé de souffrir de blessures. Il s'est d'abord blessé au mollet lors de ses derniers mois au PSG, au début de l'année 2023. Ensuite, il a été victime d'une série de coups mineurs avec l'Inter Miami, vaguement décrits comme de la "fatigue musculaire".

Il s'agit de maux compréhensibles pour quelqu'un de son âge, qui a beaucoup de kilomètres dans les jambes. Messi est certes rapide et fort, mais il n'a jamais été un athlète incroyable et n'a jamais eu besoin de s'appuyer sur ses qualités physiques pour être le meilleur au monde. Pourtant, il marche davantage ces jours-ci et on lui accorde des nuits de repos à Miami (ce qui lui a valu des ennuis avec la MLS).

Il a manqué un match de la Copa América. Celui de la rencontre entre l'Argentine et le Pérou. Le sélectionneur Lionel Scaloni a admis quelques jours avant le quart de finale contre l'Équateur qu'il ne savait pas si Messi serait prêt à jouer. Il a finalement été apte. Mais il n'est pas facile de faire abstraction de tous ces signes inquiétants.

Pourtant, si vous regardez Messi avec attention vous remarquerez tout ce qu'il fait sans le ballon. Au Real Madrid, on disait souvent de Karim Benzema que l'attaquant était le meilleur joueur au monde pour créer de l'espace pour les autres - sachant quand se faufiler dans l'espace et en sortir, montrant au monde comment ne pas toucher le ballon peut parfois être aussi important que de le toucher.

Aujourd'hui, cela s'est infiltré dans le jeu de Messi. Certaines superstars exigent le ballon - et c'est souvent le cas de Messi. Mais il est tout aussi heureux de ne pas l'avoir, de s'éloigner du jeu, d'entraîner un défenseur avec lui et de permettre à l'un des autres joueurs offensifs extrêmement talentueux de l'Argentine de faire bouger les choses.

C'est ce qui s'est passé lors de l'ouverture du score de l'Albiceleste contre le Canada en demi-finale. Messi s'est éloigné du but. Julian Alvarez avait de l'espace pour courir. Rodrigo De Paul a fait la passe, Alvarez a résisté à deux défenseurs et a marqué. Messi était à 40 mètres du ballon, mais son altruisme, sa volonté de s'écarter du chemin, ont permis de créer un but pour son équipe.

Et c'est là que réside son impact. Même lorsqu'il touche moins le ballon, Messi n'est jamais statique. Il se promène peut-être, mais il est toujours en mouvement, donnant constamment du fil à retordre aux défenses adverses. Cela ne se voit pas sur la feuille de statistiques. Ce rendement dans l'ombre n'est d'ailleurs même pas perceptible à première vue. Mais Messi, conscient de l'attention qu'il suscite, est capable de permettre aux autres de s'épanouir.

Ce n'est pas un concept nouveau. Messi lui-même a reconnu qu'il y avait un véritable art dans sa façon de marcher. Il a même conseillé à d'autres joueurs de l'Inter Miami de faire de même. La différence, c'est que ces dernières années, il a également su tirer le meilleur parti du ballon lorsqu'il l'avait dans ses pieds. Il peut être moins impliqué, mais être dévastateur lorsqu'il a l'occasion de le faire.

La Coupe du monde 2022 en est un parfait exemple. Messi a été de loin le meilleur joueur du tournoi, mais il n'a jamais été le joueur qui a touché le plus de ballons pour son équipe. Ses chiffres en matière de création d'occasions, de tirs et de passes décisives étaient tous inférieurs à ce qu'ils étaient depuis des années. La différence ? Chaque passe était propre, presque toutes les occasions ont été saisies. Grâce à lui, les demi-occasions ressemblaient à des buts faciles, les ballons impossibles à jouer à des passes décisives et impactantes.

Non, il n'a pas été impliqué autant qu'il l'aurait voulu. Mais il a su tirer le meilleur parti de toutes les occasions qui lui ont été offertes.

Et c'est là que réside la principale différence. Messi - et l'Argentine en général - ont mis en place leur équipe en sachant que Messi ne serait pas autant impliqué. Ils savent qu'il pourra se contenter des restes ou recevoir le ballon plus loin du but. Mais aujourd'hui, alors que le trophée de la Copa América est en jeu, il doit retrouver l'étincelle qui lui manque.

Et il n'y a pas que l'Argentine. Jouer cette finale à Miami est plus que significatif, car la star de l'Inter Miami est devenue l'ambassadeur de facto de la MLS. Un examen décisif pour la qualité du jeu dans la ligue. La pression n'existe pas vraiment pour Messi, mais la MLS a besoin d'une grande performance du légendaire Argentin, ne serait-ce que pour prouver qu'elle est une terre d'accueil de qualité pour Messi.

Jusqu'à présent, la magie n'a pas opéré. Le Ballon d'Or en titre n'a marqué qu'une seule fois dans le tournoi. Une sorte de claquette déviée à la suite d'un tir malencontreux. Bien sûr, tous les buts comptent et il faut savoir se placer dans la bonne zone. Mais ce but n'a pas l'air d'être un but de Messi. Ce qui manque, c'est un moment de grâce. Comme Messi est capable d'en créer.

Jusqu'à présent dans le tournoi, il n'y a rien eu de comparable à la frappe enroulée dans la lucarne contre le Mexique au Qatar, ou à la délicieuse passe décisive contre les Pays-Bas deux semaines plus tard.

C'est étrange à dire, mais avec le ballon dans ses pieds, Messi n'a pas vraiment changé le cours des rencontres.

Tout cela doit changer. La Colombie représentera un défi d'un autre genre. Le parcours de l'Albiceleste jusqu'à la finale de la Copa América a été, il faut le reconnaître, assez tranquille. L'Équateur a été un adversaire difficile, mais le Canada n'a jamais été en mesure de l'inquiéter en demi-finale. Malgré la révolution signée Jessie Marsch.

Mais cette équipe de Colombie est très, très bonne. Les Cafeteros n'ont pas perdu depuis 28 matches. Ils sont emmenés par un James Rodriguez rajeuni - oui, ce James Rodriguez - qui compte six passes décisives à son actif. Luis Diaz est un formidable ailier, tandis que Jefferson Lerma, Davidson Sanchez et Carlos Cuesta forment une excellente défense. L'Équateur était bon, mais la Colombie est bien meilleure.

Il n'y a pas vraiment de place pour l'erreur. Les performances de Messi lors des grands matches ont toujours été impressionnantes. Il a été immense lors de la finale de la Coupe du monde 2022 et a fait sien un grand nombre de Clasicos lorsqu'il jouait pour le FC Barcelone.

On s'est moqué de lui pour ses rares prestations médiocres, mais il a prouvé tout au long de sa carrière qu'il était capable de se montrer à la hauteur des grands rendez-vous. Il devra retrouver cette étincelle manquante si l'Argentine veut conserver son titre de championne de la Copa América.