Roberto Mancini Italy coachGetty Images

Avant Italie-Liechtenstein | Italie, le vent du renouveau

De l'eau a coulé sous les ponts depuis ce soir d'automne 2017 où l'Italie a fait une croix sur le Mondial russe après un match nul insipide contre la Suède (0-0). Cela faisait 60 ans que cette nation majeure du jeu n'avait pas été absente d'un grand tournoi, ce qui situe quand même son standing dans le panorama du foot mondial. La phase de digestion a été longue, écœurante même, parfois, quand elle regardait les autres avec la bave aux lèvres, mais celle de la construction a commencé. Enfin. Roberto Mancini en est le guide. 

Cela fait neuf mois que Mancini a pris les commandes de la sélection italienne. Il a succédé à Luigi Di Biagio, aussi valeureux que laborieux pour assurer la transition à partir d'un champ de ruines. Dès son arrivée, Mancini a dû marquer son territoire en prenant quelques décisions fortes, dans le choix des hommes notamment. Pour sa première liste, il avait ainsi rappelé Mario Balotelli, qu'il connait sur le bout des ongles et qu'il a appris à dompter au fil des années alors que le caractériel buteur n'avait pas mis les pieds en sélection depuis 2014. Il avait lancé quelques nouvelles têtes dans le grand bain, aussi (Berardi, Baselli, Caldara, Mandragora, Palmieri). Mais il a surtout replacé le plaisir au centre de son projet.

Le jeu avant le "je"

De tous temps, l'Italie a pu s'appuyer sur quelques têtes de gondole pour sublimer une identité de jeu marquée. Aujourd'hui, aucune tête ne dépasse. Ce constat, perçu comme une limite symbolisant un creux générationnel qui a longtemps été pointé du doigt pour expliquer la période noire de la sélection, est aussi une aubaine pour le projet de Mancini à l'instant T. Dans un football de sélection où les forces collectives priment (Espagne, Allemagne, France sur la dernière décennie), la star, c'est lui. Pas d'artistes comme Rivera, Baggio et autres Del Piero. Pas de soldats d'une élégance folle comme Baresi ou Maldini. Seul Marco Verratti, aussi talentueux qu'incorrigible, émerge dans un groupe homogène. Et ça tombe bien, Mancini a donné les clés du jeu au Parisien, qu'il a associé à Jorginho. “Depuis que je suis ici, il a toujours bien joué", a lancé le sélectionneur de l'Italie en conférence de presse cette semaine. "C’est un joueur très technique. Jorginho et lui jouent très bien ensemble. Je crois que, jusqu’à aujourd’hui, ils n’avaient joué qu’une seule fois ensemble. C’était en Angleterre, contre l’Argentine. Et c’était un bon match. Sur le plan technique, il est un joueur d’un niveau supérieur. Quand il a le ballon, c’est extraordinaire. Je suis heureux pour lui".

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Roberto Mancini Italy coachGetty Images

Articulée autour de ses régulateurs dans des schémas modulables (4-2-3-1, 4-3-3), l'Italie n'a pas totalement tourné le dos à son bon vieux mode opératoire. Samedi soir, par exemple, pour le premier match de sa campagne de qualifications contre la Finlande, elle a usé de patience avant de faire mal aux bons moments, avec un froid réalisme. Mais cela ne l'a pas empêché d'asseoir sa maîtrise collective au milieu, nouveau secteur-clé, pour remplir son contrat et bien démarrer cette phase éliminatoires. Mieux encore, en octobre dernier, un simple succès étriqué en Pologne (0-1) avait suffi pour visualiser ses nouvelles intentions. La Squadra Azzurra avait multiplié les redoublements de passe pour venir à bout de son adversaire. La manière fait son effet du côté des joueurs - Verratti en prime.

Par bonheur, ce cadre collectif n'a pas empêché certains éléments de tirer leur épingle du jeu. Depuis quelques semaines, un nom revient sur toutes les lèvres de l'autre côté des Alpes : Moise Kean. Le jeune attaquant de la Juventus, polyvalent et spontané, a débloqué son compteur en sélection en inscrivant le deuxième but de l'Italie contre la Finlande pour devenir le deuxième buteur le plus précoce de l'histoire de la Nazionale après Bruno Nicolè, détenteur d'un record acquis en 1958. Pour l'épauler, Mancini n'exclut pas l'idée d'une association avec Mario Balotelli, bien que Ciro Immobile fasse le job. "Oui, c'est tout à fait possible (de les associer). Kean est encore jeune, il peut jouer différents rôles sans problème. Nous avons regardé Kean parce que nous l'avions vu à l'entraînement et lorsque Lorenzo Insigne s'est retiré avec une blessure, nous avions besoin de quelqu'un avec des caractéristiques différentes". Reste que c'est par le prisme du collectif, et rien d'autre, que l'Italie trouvera son salut. Depuis le début de l'ère Mancini, elle a inscrit 10 buts par 10 buteurs différents. Le chiffre résume, presque à lui seul, c'est qu'est cette Italie nouvelle. Tout restera un écran de fumée si l'Italie manque un nouveau tournoi majeur, mais la Nazionale est l'épouvantail d'un groupe abordable (Grèce, Bosnie-Herzégovine, Arménie, Finlande, Liechtenstein). Portée par le vent de la révolte, elle avance. Elle est là, aussi, sa première victoire.

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