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Ligue des champions - L'Ajax, les secrets du renouveau

Mercredi soir, l'Ajax va disputer un quart de finale de la Ligue des Champions. Une première pour ce club quadruple champion d'Europe depuis la campagne 2002/03. Les Néerlandais se sont invités à ce stade de la compétition au prix d'un brillant parcours, marqué surtout par le probant et historique succès obtenu en 8es de finale retour sur le terrain du Real Madrid (4-1). Cette sortie en terre espagnole était même suffisamment spectaculaire pour qu'on évite de la réduire à un simple exploit d'un soir.

Oui, le Real a peut-être pris de haut son adversaire. Oui, les Merengue n'ont pas mis les ingrédients nécessaires à ce genre de bataille, donnant le bâton pour se faire battre alors que l'avantage acquis à l'aller aurait dû les mettre à l'abri (1-2). Mais un triple tenant du titre ne sort pas de sa compétition phare sans une adversité digne de ce nom en face. Et si l'idée que l'Ajax a surperformé durant la soirée en question est concevable, celle qui laisse suggérer que cette brillante démonstration est le fruit d'un travail de longue haleine l'est au moins tout autant.

Une génération hors pair guidée par une direction compétente

Même si le palmarès récent du championnat des Pays-Bas ne le laisse pas forcément deviner -aucun titre national glané depuis cinq ans-, l'Ajax a tout mis en œuvre ces dernières saisons pour retrouver le premier plan du football européen. Le club est reparti sur de bonnes bases avec une direction rajeunie et toutes ses composantes ont œuvré pour que les fidèles de la Johan Cruyff Arena retrouvent leur fierté. Chacun a apporté sa pierre à l'édifice et l'éclosion d'une génération brillante, ambitieuse et sans le moindre complexe, emmenée par les talents comme De Jong, De Ligt et Van de Beek, a fait le reste.

Du sérieux et des sacrifices à tous les étages, et un groupe de jeunes talentueux et aux dents longues, il n'y a manifestement pas besoin de plus pour soulever les montagnes et s'inviter à la table des plus grands.

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Membre de la première grande équipe de l'Ajax, celle qui avait conquis trois Coupes des champions consécutives au début des années 70, Ruud Krol partage cet avis. Interrogé par nos soins, cet ancien grand défenseur, aujourd'hui coach réputé sur le continent africain, admet que si l'Ajax traverse actuellement une période phare c'est tout sauf le fruit du hasard.

"Pour moi, l'Ajax a toujours su faire émerger de très bons joueurs. Ça a toujours été sa politique. Depuis la période de Johan Cruyff, il y a eu constamment ce souci de lancer les jeunes et faire en sorte qu'ils grandissent selon les préceptes en place, rappelle l'ex-international hollandais (83 sélections). C'est la philosophie du club. Pendant une période, ça s'est un peu perdu. Mais aujourd'hui, elle est de retour. Et il y a aussi le travail de la direction bien sûr. Les dirigeants, comme Marc Overmars et Edwin Van De Sar, sont aussi bons pour trouver ailleurs les joueurs qui peuvent compléter le puzzle et les qualités des autres. Notamment de par leur expérience. Et c'est un bon mélange."

L'ADN du club conservé

Comme tous ceux qui ont l'Ajax dans le cœur, Krol a beaucoup aimé ce coup de force réussi à Bernabeu. Toutefois, il assure ne pas avoir été surpris par le jeu que ses compatriotes ont produit. "J'ai vu le style de jeu que cette équipe a pratiqué, et en particulier lors des deux matches contre le Real, et je dois reconnaitre qu'il est bon. Il y a beaucoup de jeunes entourés de quelques anciens. Ils font de bonnes prestations et produisent un excellent football depuis un bon moment déjà. Les jeunes ne sont pas encore totalement matures, mais ils progressent ensemble et ont tous la particularité d'évoluer à plusieurs postes."

Parier sans crainte sur les éléments issus de son école, et faire en sorte qu'ils puissent grandir ensemble, c'est ce qu'on a toujours su faire du côté d'Amsterdam, en veillant notamment à ce que la notion du plaisir et ce souci de produire un football offensif soient toujours présents. Mais est-ce que le football total, la marque de fabrique du club implémentée par Rinus Michels et repensée par Johan Cruyff, a également su traverser les âges ?

Les quatre buts marqués sur le terrain du Real, avec ce jeu explosif, à une touche de balle et sans calcul, laisse penser que c'est le cas. Krol, lui, n'est pas totalement de cet avis : "Je ne pense pas que ce football total existe encore, nuance-t-il. Je crois que le football a beaucoup changé et évolué. Le jeu est différent. Au sein de notre équipe (dans les années 70), on avait plus de qualités je pense, notamment pour faire un pressing très haut et pendant toute la rencontre. Et puis, le règlement a aussi changé, notamment pour le hors-jeu. À l'époque, on exploitait souvent cette arme pour neutraliser les attaques adverses. Maintenant, c'est totalement différent."

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Des mercatos bien gérés et préparés

Si l'Ajax a regoûté aux joutes européennes en printemps, c'est aussi parce qu'il a conservé au fil des saisons sa colonne vertébrale et les joueurs importants qui ont quitté le club pour des destinations plus prestigieuses ont été parfaitement remplacés. On a pu le constater avec le départ principalement de Justin Kluivert (vers la Roma), que beaucoup redoutaient parmi les supporters mais qui est passé quasiment inaperçu grâce notamment au recrutement du brillant milieu offensif serbe Dusan Tadic. Il y a aussi eu, à six mois d'intervalle, le remplacement de Davinson Sanchez par Daley Blind, qui vit actuellement une seconde jeunesse avec son come-back au club. Par ailleurs, la prolongation récente d'André Onana démontre aussi que la direction sait anticiper les éventuelles attaques extérieures, en faisant miroiter à ses jeunes pousses la garantie d'un temps de jeu conséquent à défaut de pouvoir leur offrir le salaire que les géants continentaux proposent.

Bien sûr, l'Ajax ne peut pas résister à tout, et il y a des réalités économiques contre lesquelles il est difficile de lutter quand on n'appartient pas à un top championnat. C'est pourquoi des saignées restent inévitables, comme celle qui est pressentie pour l'été prochain. Mais le tout est de ne pas être pris de court, et pouvoir se renouveler sans trop s'affaiblir. Krol apprécie ce savoir-faire : "De Jong et de Ligt vont partir, et peut-être même deux ou trois autres éléments. Ça devait se produire. Mais le point positif c'est qu'ils récupèrent beaucoup d'argent en retour. Et c'est important afin de pouvoir réinvestir. Ils ont d'ailleurs déjà mis la main sur un jeune roumain (Razvan Marin, ndlr) pour la saison prochaine, afin de remplacer De Jong. Et il y aura aussi un besoin de se renforcer en défense. En recrutant quelqu'un ou en misant sur un jeune issu du club."

L'appétit vient en mangeant

Ce dont l'Ajax peut aussi profiter pour continuer à grandir, c'est de son bon parcours en C1. C'est un cercle vertueux, plus il y aura de tours franchis, plus cette équipe prendra confiance. Et plus, elle prendra confiance et plus elle sera en mesure de rivaliser avec les favoris de l'épreuve reine, avec la possibilité que ses joueurs y prennent goût. Il est d'ailleurs permis de penser que si De Jong et consorts ont réussi à dompter le Real, c'est aussi parce qu'il y a deux ans ils avaient emmagasiné de l'expérience en atteignant la finale de la Ligue Europa (perdue contre Manchester United). Les Lyonnais de Bruno Genesio doivent encore s'en souvenir, d'ailleurs, eux qui ont pris une vraie déculottée à Amsterdam.

Mercredi soir se dressera sur le chemin des Hollandais la Juventus. On peut compter sur Erik Ten Hag et ses hommes pour aborder ce rendez-vous comme le précédent, à savoir sans complexe et avec la ferme intention de déjouer les pronostics. Et ça sera tout à leur honneur, même si l'écueil de la Vieille Dame promet d'être plus compliqué à négocier que celui de la Casa Blanca.

"Ça sera plus difficile contre la Juventus, c'est certain, concède Krol. Les Italiens ne feront pas l'erreur de les sous-estimer comme le Real l'a fait. Et la Juventus, c'est une autre équipe. Et l'Ajax ne pourra plus compter sur l'effet surprise. Quoi qu'il en soit, s'ils veulent sortir la Juventus, ils devront produire le même match que face au Real. Mais tout dépendra aussi de si Ronaldo joue ou pas. C'est un joueur d'une autre dimension. C'est un phénomène et la tâche sera moins facile pour la Juve s'il ne joue pas". Même si elles ont appris à ne compter que sur elles-mêmes, les jeunes pépites de l'Ajax ne seraient pas contre ce petit coup de pouce du destin.

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