Inter now or never GFXGetty/GOAL

PSG - Inter : La dernière chance pour Simone Inzaghi et sa "vieille garde" de gagner la Ligue des Champions ?

Après une victoire maîtrisée (2-0) sur la pelouse de Feyenoord à De Kuip, le 5 mars dernier, un journaliste avait demandé à Simone Inzaghi si son équipe de l'Inter Milan visait alors le doublé Coupe-Championnat. « Un triplé », l'avait immédiatement interrompu l'entraîneur italien, le sourire aux lèvres mais le regard déterminé, en brandissant fièrement trois doigts de sa main droite.

Inzaghi souriait peut-être en prononçant ces mots, mais son ambition était alors tout ce qu'il y a de plus sérieux et de légitime pour cette équipe de l'Inter. À ce moment précis de la saison, les Nerazzurri avaient en effet déjà un pied et quatre orteils en quart de finale de la Ligue des Champions, étaient déjà qualifiés pour les demi-finales de la Coupe d'Italie, et occupaient confortablement la première place du classement en Serie A. Le rêve d'un triplé historique était donc plus que jamais permis.

Aujourd'hui, quelques semaines plus tard, à la veille de la grande finale de Ligue des Champions à Munich, la situation est bien différente. Une peur bien réelle et glaçante s'est installée : celle de voir les Nerazzurri terminer cette saison pourtant si prometteuse les mains complètement vides. Ce serait un nouveau coup dur, une désillusion amère pour cette équipe longtemps sous-estimée, voire méprisée par certains, et qui n'aura peut-être pas de sitôt une autre occasion aussi belle de remporter enfin ce trophée de la Ligue des Champions qu'elle semble pourtant si richement mériter au vu de son parcours et de la qualité de son jeu. C'est maintenant ou jamais.

  • FC Internazionale v Manchester City FC - UEFA Champions League Final 2022/23Getty Images Sport

    Le crève-cœur d'Istanbul

    La défaite subie lors de la finale de la Ligue des Champions 2023 à Istanbul face à Manchester City a profondément et durement touché l'Inter Milan. Il faut dire que très peu de gens s'attendaient à ce que les Nerazzurri remportent la victoire ce soir-là. Pour être tout à fait honnête, une pléthore de consultants et d'experts prétendument informés avaient même prédit qu'ils allaient se faire balayer, voire humilier, par la redoutable armada offensive du Manchester City de Pep Guardiola, alors grandissime favori.

    Pourtant, sur le terrain, la brillante et solide défense de l'Inter avait remarquablement réussi à complètement neutraliser la menace représentée par le cyborg norvégien Erling Haaland. Et malgré le fait d'avoir concédé l'ouverture du score sur un but quelque peu chanceux de Rodri, dont la frappe avait été légèrement déviée, les Italiens ont ensuite largement dominé le dernier quart d'heure de la rencontre, se créant plusieurs occasions franches.

    Malheureusement pour les Nerazzurri et leurs supporters, ils ont alors gaspillé une succession d'opportunités en or, de véritables balles d'égalisation qui auraient pu changer le cours de l'histoire. Romelu Lukaku, entré en cours de jeu, fut d'ailleurs le principal coupable de ce manque de réalisme et d'efficacité dans le dernier geste. Comme l'avait ensuite ironisé un Pep Guardiola visiblement soulagé et un brin chambreur lors d'une interview accordée au quotidien espagnol MARCA : « Je suis champion d'Europe aujourd'hui parce qu'un joueur adverse a réussi à rater l'immanquable à seulement trois mètres de la ligne de but ! » Une manière de reconnaître la bonne étoile de son équipe ce soir-là.

  • Publicité
  • FC Internazionale v Manchester City FC - UEFA Champions League Final 2022/23Getty Images Sport

    De la désillusion à la reconquête (avant la rechute)

    Pourtant, et c'est tout à leur honneur, si la nature cruelle de cette défaite en finale de la Ligue des Champions 2023 à Istanbul a bien évidemment profondément frustré Simone Inzaghi et l'ensemble de ses joueurs, elle ne les a absolument pas abattus ou démobilisés. Bien au contraire, cet échec au plus haut niveau semble avoir servi de source d'encouragement et de motivation supplémentaire pour la suite. Ce soir-là, à Istanbul, ils avaient fait bien plus que tenir tête à l'une des équipes les plus chères et les plus talentueuses jamais assemblées dans l'histoire du football. Et comme l'avait alors souligné avec justesse Simone Inzaghi après la rencontre, ses joueurs « méritaient très certainement, au minimum, d'aller jusqu'en prolongation » au vu de leur prestation globale.

    Par conséquent, cette performance de très haut niveau face à l'ogre mancunien, même conclue par une défaite, a en réalité paradoxalement renforcé la « confiance du groupe en ses propres capacités et en son potentiel », comme l'admettront plus tard plusieurs cadres de l'équipe. Et cette confiance retrouvée et décuplée a joué un rôle absolument majeur dans leur cavalier seul et leur domination outrageuse lors de la course au titre en Serie A la saison suivante (2023-2024), qu'ils ont remportée avec une avance confortable.

    Ils auraient d'ailleurs très certainement dû conserver leur Scudetto cette saison (2024-2025) également. Mais les Nerazzurri ont malheureusement manqué de carburant et de constance dans la toute dernière ligne droite du championnat, finissant par s'incliner pour un tout petit point derrière le Naples d'Antonio Conte, une équipe napolitaine qui, il faut le préciser, n'était pas alourdie par le poids et la fatigue des joutes européennes cette saison. Une nouvelle désillusion domestique qui rend la finale de Ligue des Champions de demain encore plus cruciale.

  • FBL-ITA-SERIEA-COMO-INTERAFP

    Manque de "tranchant" fatal en Serie A, mais héroïque en C1

    L'Inter Milan avait pourtant eu l'occasion de reprendre la tête du classement de Serie A lors de l'avant-dernière journée du championnat. Mais, coup de théâtre, les Nerazzurri ont concédé une égalisation cruelle à la 90ème minute lors de leur match nul décisif (2-2) à domicile contre la Lazio, le 18 mai dernier. Un résultat qui laissait alors Naples n'avoir besoin que d'une simple victoire à domicile contre Cagliari lors de la dernière journée pour s'assurer le Scudetto – ce que les Napolitains ont fait, en partie grâce à un but décisif de leur recrue Scott McTominay. La manière dont ce titre s'est finalement joué, échappant de si peu à l'Inter, a provoqué une immense colère et frustration au sein du club milanais. Simone Inzaghi lui-même fut d'ailleurs expulsé par l'arbitre pour sa réaction excessive suite à un penalty jugé très controversé, accordé à la Lazio par l'assistance vidéo (VAR) dans les toutes dernières secondes de cette rencontre à San Siro, pour une main peu évidente de Yann Bisseck.

    En vérité, cependant, le véritable mal, celui qui a sans doute coûté le titre à l'Inter, avait été fait bien plus tôt, lors de ce que l'on pourrait appeler la "semaine infernale" du club, à la toute fin du mois d'avril. Durant cette période noire, les Intéristes avaient en effet perdu deux matchs cruciaux en championnat, d'abord contre Bologne puis contre l'AS Roma. Et ces deux défaites étaient venues encadrer une élimination tout aussi humiliante en demi-finale de la Coupe d'Italie, concédée face au rival historique, un AC Milan pourtant en grande difficulté cette saison. Lors de ces trois rencontres rapprochées, les Nerazzurri avaient semblé totalement épuisés, complètement vidés de toute énergie physique et mentale. Simone Inzaghi avait d'ailleurs publiquement déploré à l'époque un manque flagrant de "tranchant" et de "fraîcheur" de la part de ses joueurs, une méforme qu'il attribuait à un calendrier démentiel et surchargé.

    Et pourtant, c'est au milieu de cette mini-crise de résultats et de confiance, alors que l'équipe semblait au bord de la rupture, que l'Inter Milan a, on ne sait trop comment, réussi à puiser dans ses ressources mentales et physiques les plus profondes pour réaliser l'exploit d'éliminer un FC Barcelone alors décrit comme "brillant" – et surtout bien plus jeune – au terme de ce qui restera sans doute comme la plus grande, la plus intense et la plus mémorable double confrontation de toute l'histoire de la Ligue des Champions. Un paradoxe absolument saisissant qui illustre toute la complexité et l'imprévisibilité de cette équipe de l'Inter.

  • FC Internazionale Milano v FC Barcelona - UEFA Champions League 2024/25 Semi Final Second LegGetty Images Sport

    « La beauté du football »

    Le match nul (3-3) obtenu à l'aller sur la pelouse du FC Barcelone fut déjà en soi une rencontre merveilleusement dramatique et d'une qualité technique de très haut niveau. Mais ce qui s'est déroulé lors du match retour à San Siro fut d'une tout autre dimension, quelque chose de totalement différent, un match si intense et si palpitant qu'il a, selon les rumeurs, « presque causé une crise cardiaque au grand Ronaldo » (le Brésilien, "Il Fenomeno", qui assistait nerveusement à la rencontre). David Frattesi, le milieu de terrain italien de l'Inter et auteur du but de la victoire synonyme de qualification, a d'ailleurs confié après le match qu'il avait lui-même failli s'évanouir, submergé par l'émotion, après avoir marqué.

    « C'est juste incroyable, je ne sais vraiment pas quoi dire », a ainsi confessé ce dernier, encore sous le choc, lors de son interview d'après-match avec Sky Sport Italia. « C'est ça, la beauté du football. Et pour être honnête, c'est un peu l'histoire de ma carrière, vraiment. Je n'ai jamais été béni avec un talent technique incroyable ou hors du commun, mais je suis toujours le dernier à abandonner et le premier à y croire jusqu'au bout. Donc, ce but, cette qualification, c'est une magnifique récompense pour tous les efforts et tout le dévouement que j'ai pu montrer. »

    Et ces mots, cette philosophie, auraient tout aussi bien pu s'appliquer à l'ensemble de l'équipe de l'Inter Milan cette saison. Comme l'avait d'ailleurs admis avec lucidité le défenseur Alessandro Bastoni après la victoire 2-1 de l'Inter contre le Bayern Munich lors du tour précédent (en quart de finale) : « Il y a certainement des équipes en Europe qui ont plus de talent individuel pur à leur disposition que nous. Mais avec notre organisation, notre esprit d'équipe et notre détermination, nous savons que nous pouvons causer d'énormes problèmes à n'importe quel adversaire, aussi fort soit-il. » Une force collective qui fait leur fierté.

  • Inzaghi Acerbi InterGetty

    L'expérience, l'arme secrète de l'Inter face à la jeunesse du PSG ?

    À ce stade de la compétition et au vu de leur parcours, il est tout simplement impossible de contester l'affirmation pleine de confiance d'Alessandro Bastoni. L'Inter Milan est peut-être une équipe encore sous-estimée ou sous-cotée par le grand public footballistique mondial, mais au sein même du sérail, parmi les entraîneurs et les joueurs, elle est tenue en très haute estime. Pep Guardiola lui-même n'a pas hésité à les qualifier récemment de « maîtres absolus de l'art de la défense et des transitions rapides ». Et Luis Enrique, l'entraîneur du Paris Saint-Germain, adversaire de l'Inter lors de la finale de Ligue des Champions à l'Allianz Arena de Munich, les a décrits avec respect comme étant « une vraie, une authentique équipe ». Des éloges qui en disent long.

    La seule et unique question qui demeure en suspens désormais est de savoir si l'Inter Milan aura encore suffisamment de ressources physiques et mentales, assez de "carburant dans le réservoir", après avoir bataillé si durement pour éliminer successivement le Bayern Munich et le FC Barcelone, pour réussir à créer une nouvelle surprise et à faire également trébucher le Paris Saint-Germain en finale. Car il ne faut pas oublier que l'Inter ne possède pas un effectif particulièrement jeune. C'était même, statistiquement, l'équipe la plus âgée à avoir atteint la phase à élimination directe de la Ligue des Champions cette saison. Leur onze de départ attendu pour la finale à Munich devrait ainsi contenir pas moins de quatre joueurs trentenaires (Francesco Acerbi, Yann Sommer, Henrikh Mkhitaryan et Hakan Calhanoglou), le défenseur Alessandro Bastoni, du haut de ses 26 ans, faisant presque figure de "bébé" au sein de ce groupe expérimenté.

    Simone Inzaghi, cependant, insiste sur le fait que la fenêtre d'opportunité pour son équipe n'est absolument pas encore passée et que leur maturité collective devrait justement constituer un avantage certain face à un effectif parisien certes talentueux mais relativement plus inexpérimenté à ce niveau de la compétition, plutôt qu'un désavantage. « Je ne pense absolument pas que le fait d'être une équipe un peu plus âgée soit un problème pour nous », a-t-il ainsi récemment déclaré au site officiel de l'UEFA. « Au contraire, si cela peut avoir une influence, je pense que cela peut grandement nous aider dans certains moments spécifiques, dans les instants clés de ces matchs couperets si importants. J'ai la chance d'avoir un groupe de très grands joueurs, mais par-dessus tout, de très grands hommes, qui travaillent toujours de la meilleure façon possible et qui essaient constamment de garder la tête froide et de rester lucides, même dans la tempête. » Une sérénité et une confiance qui pourraient faire la différence.

  • FC Internazionale Milano v FC Barcelona - UEFA Champions League 2024/25 Semi Final Second LegGetty Images Sport

    La dernière danse de cet Inter ?

    Il est indéniable, cependant, que le temps presse et que la fenêtre d'opportunité se referme pour Simone Inzaghi et ce groupe particulier de joueurs de l'Inter Milan. L'entraîneur lui-même a récemment admis qu'il était, une fois de plus, courtisé par d'autres grands clubs européens. Et la rumeur persistante en Italie veut qu'il envisage très sérieusement une offre mirobolante en provenance d'Arabie Saoudite, une offre qui ferait de lui l'entraîneur le mieux payé de la planète. Aucune décision définitive n'a encore été prise, et Beppe Marotta, le directeur général de l'Inter, se démène en coulisses et espère désespérément pouvoir conserver ce qu'il considère comme « l'architecte principal de cette extraordinaire série de saisons réussies ».

    Mais même si Simone Inzaghi venait à rester sur le banc des Nerazzurri la saison prochaine, il est devenu évident que l'effectif actuel de l'Inter a un besoin criant et urgent de rajeunissement et de renouvellement. Ce qui signifie qu'il pourrait, et devrait probablement, y avoir plusieurs départs importants et autant d'arrivées cet été. Car, tel qu'il est constitué actuellement, le groupe intériste ne possède tout simplement pas la profondeur de banc ni la fraîcheur physique suffisantes pour pouvoir lutter avec succès sur trois fronts (championnat, coupe nationale et Ligue des Champions) tout au long d'une saison éreintante. La preuve : ils ont disputé pas moins de 19 matchs de plus que Naples cette saison, et cette accumulation de fatigue les a clairement rattrapés et leur a coûté cher dans la dernière ligne droite du championnat de Serie A.

    Il leur reste cependant encore un match à jouer. Un seul. Mais quel match ! C'est celui qui façonnera et définira la manière dont cette saison, et même cette équipe dans son ensemble, restera dans les mémoires. Le rêve du triplé s'est certes envolé avec la perte du Scudetto. Mais à Munich, ce samedi, face au Paris Saint-Germain, l'Inter Milan peut encore soulever le plus grand, le plus prestigieux des trophées européens. C'est une opportunité en or, une chance unique qu'Inzaghi et ses joueurs doivent absolument, impérativement saisir. Car il est fort probable, au vu du contexte, que ce soit leur toute dernière.