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Hall of Fame Vol. I - Pourquoi Ronaldo (R9) est le premier nom évident de notre panthéon du football

Remplir notre "Hall of Fame" avec les footballeurs les plus emblématiques de tous les temps nous place face à un choix ardu parmi les innombrables champions d'exception (fuoriclasse) qui ont illuminé la scène du football durant ses quelque cent cinquante premières années d'existence. Ainsi, sans vouloir aucunement diminuer la grandeur des autres étoiles de l'histoire de ce sport, nous avons décidé d'inaugurer cette série par l'icône qui a si profondément marqué la fin du millénaire dernier et l'aube du nouveau : Ronaldo, "Il Fenomeno".

La carrière de Ronaldo possède en effet une particularité qui la distingue de beaucoup d'autres : tous les amoureux du football, même les moins passionnés ou les plus jeunes, sauraient instinctivement décrire les "instantanés", les images les plus significatives et les plus marquantes du parcours professionnel du "Fenomeno".

Son but incroyable inscrit en finale de la Coupe UEFA à Paris contre la Lazio, son slalom ahurissant au milieu des défenseurs de Compostelle, la Coupe du Monde 2002 soulevée au ciel avec une coupe de cheveux pour le moins singulière et inattendue... Mais aussi, malheureusement, le "crac" terrible de son genou sur la pelouse du stade Olympique de Rome, ou encore cette photo tristement célèbre sur la passerelle de l'avion qui ramenait une Seleçao défaite et meurtrie à la maison après la finale de la Coupe du Monde en France en 98. Cinq instantanés seulement, les premiers qui nous sont spontanément venus à l'esprit, tirés d'une carrière si riche en images épiques, inoubliables et surtout, profondément iconiques.

Car Ronaldo, peut-être même avant d'être l'immense footballeur que l'on sait, fut avant tout une icône. L'icône d'un football qui, en l'espace d'un instant, s'est transformé radicalement, changeant de visage et de physionomie en un éclair, tant sur le plan technico-athlétique que sur le plan économique et médiatique. Une transformation profonde qui fut guidée, et même incarnée à bien des égards, par ce jeune prodige grandi dans le quartier modeste de Bento Ribeiro à Rio, entre les rues poussiéreuses et une vie déjà pleine de promesses.

  • Ronaldo PSV EindhovenGetty Images

    ET SI...

    Écrire sur le champion brésilien sans tomber dans le piège facile de la rhétorique enflammée est une entreprise particulièrement ardue. Tant de choses ont été écrites et dites sur Ronaldo. Mais l'une des réflexions les plus iconoclastes et peut-être impopulaires que l'on puisse formuler à son sujet est sans doute la suivante : l'image de Ronaldo qui est restée gravée dans l'imaginaire collectif serait-elle exactement la même sans les terribles problèmes physiques qui ont inévitablement et lourdement conditionné sa carrière ? D'aucuns soutiennent en effet que c'est précisément cette aura du "what if", du "qu'aurait-il pu être si...", qui a contribué à en faire une icône aussi immortelle et universellement admirée. Une opinion qui peut choquer, nous l'avons dit, mais une réflexion qui a certainement – peut-être seulement en infime partie, certes – contribué à accroître encore davantage le mythe d'un footballeur qui, de toute façon, et malgré tous ses malheurs, a été capable de marquer l'histoire de ce sport comme très peu d'autres avant ou après lui.

    Lorsqu'à la surprise quasi générale, et alors qu'il était déjà courtisé avec insistance par des géants comme l'AC Milan et le FC Barcelone, le jeune Ronaldo décida de rejoindre les rangs plus modestes du PSV Eindhoven aux Pays-Bas, lui et son entourage firent preuve d'une intelligence et d'une clairvoyance stratégique dignes d'éloges. Les deux saisons qu'il passa ensuite en Eredivisie lui permirent en effet de "s'acclimater" en douceur au football européen et à ses exigences, sans subir l'impact brutal et immédiat de championnats aussi difficiles et tactiques que la Serie A italienne ou la Liga espagnole de la fin des années 90. Et surtout, sans la pression démesurée de supporters habitués à tout gagner, tout de suite. Comme Ronaldo lui-même l'a souvent raconté par la suite, son adaptation à la vie et à la culture néerlandaises ne fut pas des plus simples au début. Mais la possibilité de pouvoir faire la différence sur le terrain chaque week-end face à des adversaires certainement plus abordables l'aida grandement à résister à toute tentation de "saudade" (nostalgie du pays) et à poursuivre son apprentissage.

    Ces deux années passées aux Pays-Bas, même si la seconde fut malheureusement tronquée de moitié par une première grave blessure au genou, lui ouvrirent en grand les portes pour le véritable saut vers les sommets. Désormais, oui, Ronaldo était fin prêt pour le FC Barcelone. Peut-être même plus prêt que quiconque ne l'imaginait à l'époque. La seule et unique saison qu'il vécut ensuite en terre catalane (1996-1997) représente d'ailleurs un cas unique dans l'histoire du football, un pic de performance et de domination individuelle difficilement oubliable : 34 buts inscrits en 37 matchs disputés en Liga, un total ahurissant de 47 buts en 49 rencontres toutes compétitions confondues, des prestations à couper le souffle, des accélérations extraterrestres, des buts en cascade et surtout cette capacité, probablement jamais vue auparavant à un tel niveau, d'aller marquer après avoir dribblé y compris le gardien adverse avec une facilité déconcertante. Buts sur buts, records sur records, et un Ballon d'Or déjà virtuellement mis en coffre-fort dès le mois de mai, qu'il est simplement allé ensuite officiellement chercher et récupérer en France au mois de novembre suivant, alors qu'il était déjà devenu entre-temps un joueur de l'Inter Milan. Stratosphérique.

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  • Ronaldo Inter 97' 98'Getty Images

    Les années Inter : entre calvaire et extase

    Mais c'est précisément durant les années où il a porté le maillot de l'Inter Milan – ironie suprême du sort, celles où il a atteint son apogée technique et sa splendeur maximale – que Ronaldo a vécu ses moments les plus dramatiques et les plus douloureux. À commencer, bien sûr, par le fameux et mystérieux malaise dont il fut victime quelques heures seulement avant la finale de la Coupe du Monde en France en 1998. Puis, il y eut la terrible double blessure au tendon rotulien du genou droit qui, entre novembre 1999 et avril 2000, a brutalement et définitivement limité son ascension fulgurante vers les sommets. Et enfin, comment oublier les larmes incontrôlables versées sur le banc de touche du Stade Olympique de Rome, un certain 5 mai 2002, lorsqu'il a vu le Scudetto, qui semblait promis à l'Inter, s'envoler cruellement lors de l'ultime journée de championnat au profit de la Juventus.

    Mais tout comme les défenseurs adverses sur le terrain, même la malchance la plus tenace n'est jamais parvenue à contenir à 100% le Phénomène. Il fut toujours capable de se relever, de surmonter les épreuves et de reprendre par la force de son talent et de sa volonté ce que le sort semblait lui avoir injustement enlevé. Il a ainsi conquis, en véritable leader et en moteur absolu de son équipe, la Coupe du Monde suivante, en 2002 en Corée et au Japon. Il a également remporté cette année-là son deuxième Ballon d'Or, un trophée qui semblait d'ailleurs déjà lui être destiné quatre ans plus tôt, avant cette terrible journée à Paris durant laquelle Zinédine Zidane avait inscrit de manière indélébile son nom dans l'histoire du football mondial, précisément face à un Ronaldo diminué, fantomatique, et défini ce soir-là comme "méconnaissable" par les journaux du monde entier.

    Ce n'est que bien plus tard que toute la vérité sur son état de santé réel avant cette finale de 98 finirait par éclater au grand jour, permettant à tous de comprendre que celui qui était descendu sur la pelouse du Stade de France ce soir-là n'était, en réalité, que le fantôme du footballeur exceptionnel qui, très probablement, si le match s'était disputé vingt-quatre heures plus tôt ou plus tard, en aurait sans doute réécrit l'histoire de manière bien différente. Car Ronaldo – et nous n'en ajouterons pas davantage pour ne pas tomber dans la rhétorique dithyrambique évoquée plus haut – a été l'un des très rares footballeurs (on peut les compter sur les doigts d'une main à chaque génération) capables de gagner des matchs à eux seuls. Un joueur capable d'allier une efficacité clinique et une créativité spectaculaire, de régaler le public par des gestes techniques venus d'ailleurs sans jamais perdre de vue l'objectif premier : la concrétisation, le but, le résultat final.

    Un footballeur à l'efficacité dévastatrice, certes, mais aussi tellement beau, magnifique à voir jouer. Et qui se déplaçait sur le terrain à une vitesse qui, pour l'époque, frisait le mythologique, le surnaturel. Mais même lorsque sa proverbiale vitesse et son explosivité ont logiquement commencé à décliner en fin de carrière, Ronaldo a encore réussi à laisser une trace indélébile (et quelle trace !) en retournant dans son pays natal. Il a ainsi contribué, par des buts extraordinaires et décisifs, à un doublé historique (Coupe du Brésil et Championnat Paulista en 2009) qui est entré pour toujours dans la légende du club des Corinthians.

  • Ronaldo Brazil Germany 2002 World Cup finalGetty

    Symbole de rédemption et de résilience

    L'obstination, la détermination sans faille, la capacité à toujours se relever après les coups les plus durs et l'audace de ne jamais renoncer face à l'adversité : Ronaldo "Il Fenomeno" est un exemple extraordinaire et une incarnation quasi parfaite de ces quatre qualités – et ce ne sont pas des moindres – qui distinguent et caractérisent les plus grands athlètes de l'histoire, tous sports confondus. L'histoire de sa carrière est en effet, avant toute chose, une histoire de rédemption, un récit de résilience. Une histoire partie du plus classique des stéréotypes qui veut que la gloire et la reconnaissance finissent par couronner le jeune garçon grandi au milieu de mille difficultés et avec très peu de choses entre les mains. Une histoire qui l'a finalement mené jusqu'aux lustres et aux paillettes de Paris où, en 2002, cinq petites années seulement après avoir reçu son premier Ballon d'Or, un Ronaldo totalement changé, avec une histoire personnelle et une maturité bien différentes à raconter, se présenta de nouveau au grand public mondial avec, une nouvelle fois, le Ballon d'Or entre les mains, le prix le plus convoité et le plus prestigieux pour chaque footballeur.

    Se relever et revenir au plus haut niveau après la terrible double blessure au genou qu'il a subie aurait été un défi immense, quasi insurmontable, pour n'importe quel autre joueur. Mais Ronaldo a eu le mérite et la force mentale exceptionnels de ne jamais rien lâcher, de toujours croire en lui-même et en ses capacités, et surtout de résister à la tentation, pourtant si forte et si compréhensible, de tout abandonner lorsque sa carrière semblait bel et bien finie, compromise à jamais. Et au contraire, tel un véritable rapace flairant la moindre opportunité, lorsque la FIFA décida d'élargir le nombre de joueurs sélectionnables de vingt-deux à vingt-trois pour la Coupe du Monde 2002 – une décision qui, selon de nombreuses rumeurs persistantes, semblait justement taillée sur mesure pour permettre au Brésil et à l'Italie de pouvoir convoquer respectivement Ronaldo et Roberto Baggio sans pour autant devoir écarter un joueur du groupe que leurs sélectionneurs respectifs avaient déjà en tête – le sélectionneur auriverde de l'époque, Luiz Felipe Scolari, à la différence notable de son homologue italien Giovanni Trapattoni (qui n'avait pas retenu Baggio), offrit à sa star convalescente l'occasion unique de prouver qu'il pouvait encore être utile.

    Une occasion que Ronaldo saisit immédiatement au vol, avec la détermination et l'enthousiasme qui le caractérisaient. Toujours souriant malgré les épreuves, et arborant pour l'occasion une coupe de cheveux pour le moins singulière et devenue iconique, il réussit l'exploit retentissant de remporter cette Coupe du Monde en étant le protagoniste absolu, le leader technique et le buteur providentiel de sa sélection. Un exploit et une influence sur le jeu de son équipe comme peut-être seul avant lui un certain Diego Armando Maradona avait réussi à le faire lors du Mondial 86. Une véritable résurrection.

  • Ronaldo 1998Getty Images

    Une icône aussi en dehors du terrain

    Nous avons d'emblée défini Ronaldo comme une véritable icône et nous avons ouvert cet article en évoquant les "instantanés", les images les plus mémorables et les plus marquantes de sa carrière sur les terrains. Mais Ronaldo, comme peut-être aucun autre footballeur avant lui, et très peu après lui, a également été un symbole extrêmement important et influent en dehors des pelouses. Ses célébrissimes campagnes publicitaires, qui l'ont par exemple indissolublement lié à des marques mondialement connues comme Nike (avec notamment le spot mythique à l'aéroport) ou Pirelli (avec la pose de la statue du Christ Rédempteur sur le pneu), lui ont permis de devenir une figure populaire et reconnue même auprès de ceux qui ne suivaient le football que de très loin, voire pas du tout.

    Mémorable et totalement unique fut également son choix, à l'époque, de ne pas concéder ses droits d'image au jeu vidéo officiel de la FIFA, pour l'édition FIFA '99 qui restera sans doute à jamais comme l'une des plus populaires et des plus jouées de la franchise. Ronaldo, en effet, avait à ce moment-là accordé les droits exclusifs pour l'utilisation de son nom et de son image au jeu vidéo concurrent "Ronaldo V-Football" (édité par Infogrames). Par conséquent, aucun autre jeu vidéo ne pouvait utiliser son nom jusqu'en 2001.

    Sur les autres simulations de football de l'époque, et notamment dans le très populaire FIFA, son personnage ne pouvait donc être ni Nazario, ni Luis, ni encore moins De Lima. Et encore moins, bien sûr, être simplement appelé "Ronaldo". Ainsi, le pseudonyme un peu absurde d'"A.Calcio" choisi pour le "rebaptiser" en catastrophe dans l'édition '99, puis le peut-être encore plus célèbre "No.9" – prononcé avec l'accent anglais "Number Nine" par le commentateur du jeu – qui l'accompagna dans les deux éditions suivantes du jeu vidéo de la FIFA, sont devenus paradoxalement et contre toute attente extrêmement populaires à leur tour auprès des joueurs, au point de devenir des surnoms affectueux et reconnus.

    Et ce fameux "Ronaldo Number Nine", quelques années plus tard, lorsqu'un autre phénomène portugais du même nom allait exploser sur la scène mondiale, devint l'un des moyens les plus simples et les plus utilisés pour le distinguer de cet autre Cristiano Ronaldo qui a, lui aussi, écrit en lettres d'or quelques-unes des plus belles pages de l'histoire du football. Même si, pour être tout à fait honnête, tous ceux qui ont eu la chance de le voir jouer de près, de vivre ses exploits en direct, préfèrent encore et toujours simplement l'appeler "Il Fenomeno". Parce que c'est exactement ce qu'il était. Malgré tout. Un phénomène. Inégalable et inoubliable.

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