Earps PSG chaos GFXGetty/GOAL

Entre crise et instabilité, le PSG féminin termine sa saison dans la confusion

Lorsqu’elle a signé au Paris Saint-Germain l’été dernier, Mary Earps s’attendait à vivre de grandes choses. « Le club veut devenir la meilleure équipe d’Europe, la meilleure équipe du monde, et c’est exactement ce que je veux être », expliquait-elle alors. Mais la première saison de la gardienne anglaise en France s’est achevée vendredi sur un nouvel échec : un penalty « panenka » de Wendie Renard est venu sceller la victoire 3-0 de l’Olympique Lyonnais et offrir un nouveau titre aux Fenottes, laissant les Parisiennes bredouilles.

Le bilan ne peut toutefois pas être imputé à Earps. Après un début de saison où sa place de titulaire avait été mise en doute, elle s’est imposée dans les cages et a contribué à faire du PSG la deuxième meilleure défense du championnat, derrière... Lyon. Seule Christiane Endler, la portière de l’OL, a terminé avec plus de clean sheets.

Mais Earps a surtout été témoin, de l’intérieur, du chaos récurrent qui mine le PSG féminin et l’empêche de franchir un cap. Cette année, alors que l’équipe masculine brille sur tous les tableaux – deux titres déjà, une finale de Coupe de France à venir, et surtout une finale de Ligue des champions contre l’Inter – ce sont les filles qui ont porté la charge des déceptions. Sans titre, sans coach, et sans qualification pour la C1, la saison du PSG féminin s’est achevée dans une indifférence presque gênée, symptomatique d’un projet encore en quête de clarté.

  • Jocelyn Precheur Michele Kang Kosovare Asllani London City Lionesses 2024Wing Chong

    Un départ lourd de sens

    Tout a commencé en juin dernier, avec le départ de Jocelyn Prêcheur. À 43 ans, l'entraîneur sortait d’une première saison prometteuse à la tête du PSG féminin, marquée par la conquête de la Coupe de France – seulement le cinquième trophée majeur dans l’histoire de la section. Perdre un technicien aussi apprécié fut déjà un coup dur... mais le voir partir pour ce club-là en a rajouté une couche.

    Prêcheur a choisi de rejoindre les London City Lionesses, une équipe de deuxième division anglaise. Un choix surprenant sur le papier. Car si le club londonien affiche de grandes ambitions – il appartient à Michele Kang, qui n’est autre que la propriétaire... de l’Olympique Lyonnais – il évoluait alors à un niveau bien inférieur à celui du PSG. Durant l’été, les Lionesses ont mené un recrutement agressif, attirant plusieurs internationales avec pour objectif immédiat d’accéder à la Women’s Super League. Mission accomplie grâce à un nul décroché lors de la dernière journée sur la pelouse de Birmingham City.

    Mais ce choix interroge : que dit-il de l’attractivité du projet parisien si un entraîneur décide de tourner le dos à un club censé jouer les premiers rôles en Europe pour se lancer dans un défi en deuxième division anglaise ?

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  • Amalie Vangsgaard Mary Earps Juventus PSG Women 2024-25Getty Images

    Une entrée en matière ratée

    Il y avait pourtant de quoi se montrer optimiste au moment de l’arrivée du successeur de Prêcheur : Fabrice Abriel. Ancien milieu de terrain passé par Lorient, Marseille et Nice, le technicien sortait de trois saisons réussies à la tête de Fleury, un club aux moyens modestes – notamment en raison du faible rayonnement de sa section masculine. Malgré cela, Abriel y avait obtenu trois top 5 en championnat, deux demi-finales de Coupe de France et même une finale lors de sa dernière année.

    Mais ses débuts à Paris furent loin d’être convaincants. Pour son premier match officiel sur le banc du PSG, son équipe s’incline 3-1 sur la pelouse de la Juventus, lors du barrage aller de la Ligue des champions. Rien n’était encore perdu, d’autant que le match retour se disputait au Parc des Princes, dans un groupe pourtant riche en talents : Marie-Antoinette Katoto, Sakina Karchaoui, Grace Geyoro… Tous les ingrédients semblaient réunis pour renverser la situation. Mais une nouvelle prestation décevante, ponctuée par une défaite 2-1, enterra les espoirs de qualification dès les portes de la phase de groupes.

  • Grace Geyoro PSG Women 2024-25Getty Images

    La controverse permanente

    La pression est rapidement montée autour de Fabrice Abriel. Échouer à qualifier le PSG pour la phase de groupes de la Ligue des champions avait déjà mis le feu aux poudres, et la situation n’a fait qu’empirer au fil des semaines, à mesure que les tensions internes ont éclaté au grand jour. Dès le début de saison, un premier signal fort a semé le trouble : Grace Geyoro, pourtant cadre du vestiaire et l’une des meilleures joueuses de l’équipe, a été dépossédée du brassard de capitaine. Elle a ensuite été écartée durant trois matchs. Dans une interview à L’Équipe en novembre, la milieu de terrain confiait : « Je ne peux pas contrôler ce que les gens disent ou ce qui se passe. Je ne peux rien contre la méchanceté ou l’injustice. »

    Geyoro n’est pas la seule cadre à avoir été mise de côté. Mary Earps a également manqué plusieurs rencontres sans réelle explication. Plus récemment, après le but de Sakina Karchaoui en demi-finale de play-offs face au Paris FC — quelques semaines seulement après avoir été écartée par Abriel — la réaction d’Elisa De Almeida a été lourde de sens : « Vous savez aussi bien que moi que sans une joueuse comme elle sur le terrain, c’est plus compliqué. Et ce but… c’est un peu, comment dire… le karma », a-t-elle lancé avec un sourire.

    Et que dire de Marie-Antoinette Katoto ? Meilleure buteuse de l’histoire du club, référence mondiale à son poste, elle aussi a été laissée sur le banc à plusieurs reprises cette saison. Son départ en fin de contrat semble désormais acté, avec Le Parisien annonçant un accord avec l’ennemi juré, l’Olympique Lyonnais. Dans ce contexte tendu, la gestion humaine d’Abriel a fait grincer des dents — d’autant plus qu’elle n’a pas été compensée par des résultats à la hauteur des ambitions du club.

  • Fabrice Abriel PSG 2024-25Getty Images

    Un départ sans surprise

    Dans ce contexte, le limogeage de Fabrice Abriel n’a surpris personne. L’annonce est tombée au début du mois de mai, dans la foulée de la défaite en finale de Coupe de France face au Paris FC — un match pour lequel Mary Earps, Sakina Karchaoui et Marie-Antoinette Katoto avaient toutes été reléguées sur le banc.

    Mais à l’image de la saison du PSG, c’est surtout la gestion de cette éviction qui en a dit long sur le désordre ambiant. Le Parisien a révélé le départ d’Abriel dès le lundi 5 mai. Pourtant, le club n’a officiellement réagi que deux jours plus tard, dans un message aussi bref qu’étonnant publié sur X, quelques heures seulement avant un match de championnat contre Nantes.

    En treize mots, le compte du PSG féminin s’est contenté d’écrire : « L’équipe sera coachée par Paulo Cesar pour ce match face à Nantes. »

  • Lyon Women league trophy 2024-25Getty Images

    La domination de Lyon

    Sous la direction de Paulo Cesar, entraîneur de l’équipe U19 féminine sacrée championne cette saison, le PSG est parvenu à prendre sa revanche sur le Paris FC en demi-finale des playoffs du championnat, s’imposant 3-0 pour rejoindre la finale. Mais comme souvent, Lyon s’est dressé en obstacle infranchissable.

    Avec des buts de Melchie Dumornay, Kadidiatou Diani et ce penalty de Wendie Renard, l’OL s’est imposé sans trembler, ajoutant un 18e titre de championnes de France en 19 saisons. Le seul accroc reste la saison 2020-2021, lorsque Paris avait brièvement renversé l’ordre établi.

    Il est important de souligner, malgré les nombreux problèmes internes du PSG cette année, l’excellence constante de Lyon, qui continue d’éclipser tous ses concurrents. Depuis deux décennies, l’OL est le phare du football féminin européen : 8 Ligues des champions, une domination domestique quasi totale, et une capacité impressionnante à attirer les plus grandes joueuses de la planète.

    Le club rhodanien ne cesse d’investir, d’innover et de se renforcer, même quand il semble ne plus avoir de marge de progression. Résultat : un palmarès étourdissant, et un vivier de talents inépuisable. Marie-Antoinette Katoto, elle-même sur le départ du PSG, semble d’ailleurs bien partie pour rallier l’ogre lyonnais à son tour.

  • Mary Earps PSG Women 2024-25Getty Images

    Un sérieux besoin de renouveau

    Si le PSG veut vraiment devenir, comme l’affirmait Mary Earps à son arrivée, « la meilleure équipe du monde », alors il va falloir commencer par mettre fin au chaos permanent. Il faudra nommer le bon entraîneur cet été, investir intelligemment dans l’effectif, et – surtout – réussir une saison sans polémiques si le club veut espérer rattraper Lyon, qu’il n’a plus battu depuis 11 confrontations.

    Le pire, c’est que cette équipe est loin d’être mauvaise. Elle compte dans ses rangs des talents de classe mondiale comme Earps, Geyoro, Karchaoui ou Katoto ; Romee Leuchter incarne l’avenir de l’attaque ; Griedge Mbock Bathy et Crystal Dunn ont un vécu exceptionnel au plus haut niveau avec Lyon et les États-Unis ; et tout cela est soutenu par une formation en plein essor, comme en témoigne le titre national remporté par les U19 et la montée en puissance de plusieurs jeunes joueuses intégrées cette saison à l’équipe première.

    Mais trop de défaillances structurelles plombent encore ce groupe. Et cette saison en a été la démonstration éclatante.

    Est-ce que 2025-2026 sera enfin celle du déclic ? Cela dépendra du successeur de Fabrice Abriel, des éventuels autres départs majeurs après celui annoncé de Katoto, et des renforts que le club parviendra à attirer cet été.

    Une chose est certaine, néanmoins : le PSG est capable de beaucoup mieux. Et il est grand temps de le prouver.

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