L'actualité est rythmée par les scénarios de reprise des championnats de Ligue 1 et Ligue 2. Mais que deviennent les centres de formation au sein des clubs pros ? Avec la mise à l'arrêt du football en raison de l'épidémie du Covid-19, eux aussi ont été frappés de plein fouet. D'abord, parce que la plupart des clubs français ont appliqué le chômage partiel chez leurs salariés. Ensuite, parce qu'il a fallu trouver des solutions pour s'adapter et continuer à gérer ce qui devait l'être durant cette période.
Contrats pro, départs en fin de saison : le PSG acte l'avenir de ses jeunes
Au Havre, François Rodrigues, le directeur du centre de formation, détaille la situation pour Goal : "Le centre est désert, il n'y a plus personne. Tous les éducateurs sont en chômage partiel même si entre le responsable administratif, le président de l'association et moi-même, on a des passages tous les deux jours. On relève le courrier, les mails, ce genre de choses. On échange aussi, parce qu'on arrive sur une période de décisions. D'ailleurs, cette semaine, j'ai demandé aux entraîneurs de chaque catégorie d'organiser les prébilans avec les joueurs et leur famille, par téléphone ou par visio-conférence, afin que chacun ait une tendance pour la suite contractuellement parlant, et sache s'il est gardé et sous quelle condition." Une première urgence pour de nombreux clubs français, comme le RC Lens par exemple, ou le Paris Saint-Germain, qui le mois dernier a tranché sur les contrats par le biais de Jean-François Pien, le directeur du centre, et Angelo Castellazzi, le directeur sportif adjoint.
La date du 30 avril
Officiellement, les clubs ont jusqu'au 30 avril prochain pour exprimer leurs intentions aux joueurs en fin de contrat stagiaire et aspirant. Les 2000 et 2002. Une date qui n'a pas évolué malgré la situation peu banale. "Aujourd'hui, on n'a pas eu d'information comme quoi cette date était modifiée, reprend Rodrigues. Chez nous, on sait déjà qui fait quoi. Toutes nos décisions sont quasiment prises pour les orientations à venir. Il y a des réunions qui sont organisées pour ne pas se retrouver coincés. On va peut-être prendre quelques risques avec certains joueurs, il y aura peut-être des erreurs de faites, mais c'est à nous de réduire cette marge le plus possible."
Contrairement au HAC, au PSG ou à Lens, d'autres clubs ont décidé de se donner du temps. Au Stade Rennais, notamment, on prône la patience. Et même si la plupart des décisions sont actées, les familles des joueurs nés en 2000 ou 2002 n'ont pas eu le retour définitif du club breton. "Le plus embêtant c'est d'annoncer des mauvaises nouvelles par téléphone ou visio-call, commente le directeur du centre de formation d'un autre club de Ligue 1. Il faut s'interdir qu'un joueur découvre sa situation et tombe du ciel."
Des entraînements adaptés
Reste à gérer la question des entraînements. Car comme les professionnels, les jeunes ont reçu des programmes à suivre quotidiennement. Pour cela, chacun sa méthode. "J'ai trois prépas athlétiques qui font des séances en visio pour chaque catégorie, explique l'un des acteurs en L1. Tous les matins, ils ont une séance à 10 heures. Ils font du renforcement, du cardio, du travail de souplesse, de proprioception. Un peu de tout. Tous ensemble devant la caméra. Les coaches du groupe sont là, même l'adjoint et l'entraîneur des gardiens de but. Ils peuvent ainsi corriger les postures. C'est interactif et ça dure entre 60 et 75 minutes."
Au Havre, l'option choisie est différente, et c'est via leur smartphone que le travail des joueurs est contrôlé : "Chez nous, chaque joueur peut travailler avec son téléphone. Il renvoie ses exos au préparateur athlétique, qui vérifie si c'est bien fait. On a la chance d'avoir des prépas qui sont dans le coup. On s'est adapté aux nouvelles technologies. De mon côté, j'ai le retour avec les entraîneurs, et c'est parfait", précise François Rodrigues. Il poursuit : "La plus grosse crainte, c'est d'avoir une grosse déperdition concernant leur morphologie parce qu'on ne contrôle pas ce qu'ils mangent, à quelle heure ils se couchent alors qu'au centre on sait ce qu'il font."
La scolarité et le recrutement
C'est là que la prévention prend tout son sens. Elle est valable pour les entraînements, la nutrition, le sommeil, comme pour la scolarité des jeunes joueurs contraints de travailler chez eux. Au Havre comme à Paris, un responsable de la scolarité suit les élèves en collaboration avec les professeurs. Des cours sont donnés par visio-conférence, et François Rodrigues a déjà alerté les familles sur l'importance des études : "J'ai envoyé un courrier à chaque parent en leur précisant que si l'enfant n'était pas investi, je me donnais le droit de retirer la prise en charge du club sur la scolarité." Une manière de mettre tout le monde face à une réalité qui impose des efforts à chaque étage.
Même le recrutement pour la saison prochaine a été chamboulé.Certains dossiers étaient en route et sont au ralenti dans les centres de formation et à la préformation. Rodrigues cite un exemple : "On était en concurrence avec plusieurs clubs pour signer un gamin. Il devait venir chez nous, mais il n'a pas pu visiter notre centre avant le confinement. On n'a pas pu lui montrer le Stade Océane, rencontrer sa famille, et on vient d'apprendre qu'il s'était engagé avec un des deux clubs qu'il est allé visiter avant nous."
L'avenir des éducateurs anime aussi certains centres. Et là encore, Le Havre est à pied d'œuvre. "On est en plein là-dessus en ce moment. On veut rester en catégorie 1 et des investissements auraient dû être faits. Maintenant, est-ce qu'on va m'autoriser, par exemple, à recruter quelqu'un pour la vidéo, je n'en suis plus certain", conclut l'ancien Parisien. Les conséquences d'une situation impactante à tous les niveaux. Même chez les non-professionnels.
