Certains joueurs marquent les esprits par leurs buts, d'autres par leur personnalité. Samuel Eto'o fait partie de ceux qui ont maîtrisé les deux. Le journaliste de L'Équipe, Hervé Penot, a récemment partagé une histoire qui illustre parfaitement le caractère unique du Camerounais. La scène se déroule en décembre 2005. Le journaliste est à Ibrox Park pour un match de Ligue des Champions, plongé dans une ambiance de folie. Son téléphone sonne. À l'autre bout du fil, un Samuel Eto'o au sommet de son art avec le Barça, et visiblement furieux.
"C'est pas ma faute si Giuly rate"
Le motif de l'appel ? Une simple parenthèse dans un article de L'Équipe. Eto'o y affirmait être le meilleur buteur et passeur du club. Le journal avait précisé : "(Non, il est deuxième passeur derrière Ronaldinho)". Une correction qui n'a pas du tout plu à l'intéressé. Face à l'argument factuel du journaliste, la réponse du Camerounais est un monument. "Oui, mais ce n'est pas ma faute si quand je fais une passe à Giuly, la balle elle passe à côté. Quand Ronaldinho fait une passe à Eto'o, eh bah Eto'o il marque le but."
Cette punchline, d'une logique implacable et d'une confiance en soi absolue, est la quintessence du personnage. Au passage, il égratigne sans ménagement son coéquipier français, Ludovic Giuly, désigné comme le maillon faible qui l'empêche d'être au sommet des classements statistiques. Pour Eto'o, la qualité de la passe était là, mais pas celle du finisseur. Il enfonce le clou en parlant de lui à la troisième personne : "Si vous êtes passeur pour Eto'o, vous serez les meilleurs passeurs facilement."
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Eto'o, une confiance en soi comme moteur
Cette anecdote va bien au-delà de la simple arrogance. Elle révèle la mentalité d'un compétiteur acharné, obsédé par la perfection et par la reconnaissance de sa propre valeur. Eto'o ne supportait pas que l'on puisse remettre en question son statut, même sur un détail statistique. Cette mentalité n'a d'ailleurs pas pris une ride et pourrait bien refaire surface. Un certain Mohamed Salah vient en effet de s'autoproclamer "meilleur joueur africain de l'histoire". Une affirmation pour le moins osée.
On peut supposer que l'intéressé ne va que très peu apprécier, et on ne serait pas surpris que le nom d'Eto'o s'affiche bientôt sur le portable de l'Égyptien pour une petite mise au point... Car si Eto'o n'hésitait pas à appeler un journaliste pour une ligne dans un journal, on peut imaginer sa réaction face à quelqu'un qui prétend lui ravir sa couronne continentale.
Cette intransigeance face à toute remise en cause de son statut révèle ce qui a toujours animé Eto'o : cette "mégalomanie", cette conviction d'être le meilleur, qui était son véritable moteur. C'est précisément cette mentalité qui lui a permis de devenir l'un des plus grands buteurs de sa génération et de remporter la Ligue des Champions avec deux clubs différents. Loin d'être un défaut, cette confiance inébranlable était l'arme principale d'un joueur qui ne visait rien d'autre que le sommet. Cette histoire, presque 20 ans plus tard, nous le rappelle avec humour, et l'actualité pourrait bien nous en offrir une nouvelle illustration.


