La renaissance de La Masia : Comment l'académie du Barça a commencé à reproduire des joueurs de classe mondiale de nouveau

Lorsque Pep Guardiola a pris les rênes de l'équipe en 2008, La Masia avait toujours été un lieu riche en talents. L'équipe première dont il a hérité comprenait un certain nombre de joueurs de haut niveau issus du centre de formation. Un certain Lionel Messi s'y distinguait, mais Carles Puyol, Andreas Iniesta, Xavi et Victor Valdes formaient aussi un noyau de joueurs du crû.

Guardiola, lui-même issu de La Masia, n'a fait que renforcer ce noyau. Il a intégré Sergio Busquets dans l'équipe, donné de précieuses minutes à Thiago Alcantara et racheté Gerard Piqué - un jeune produit du Barça - à Manchester United au cours de son premier été à ce poste. En 2009, le légendaire entraineur avait mis en place une équipe catalane à part entière, la colonne vertébrale de l'équipe nationale espagnole dominante, et cinq joueurs issus de La Masia jouaient presque tous les matches.

Cette équipe s'est rapidement fait remarquer aux yeux du monde entier, le Tiki-Taka devenant la marque de ce club et le concept amélioré entre les murs de sa célèbre académie.

Mais les choses ont vite changé. Joan Laporta a supervisé les premières années de la renaissance de La Masia, mais le nouveau président Josep Bartomeu, qui a pris ses fonctions en 2014, a entrepris de la démolir. Il avait travaillé sous la direction de Laporta à la fin des années 2000, mais lorsqu'il a été appelé à assumer lui-même ce rôle, Bartomeu a adopté une approche différente. Son règne s'est caractérisé non seulement par une mauvaise gestion des fonds du club, mais aussi par une politique de transferts à l'emporte-pièces qui négligeait souvent les jeunes.

Il y a eu quelques bons transferts sous son mandat, avec l'arrivée de Luis Suarez et d'Ivan Rakitic. Mais il a également pris des décisions catastrophiques sur le marché. Ses achats font froid dans le dos : Ousmane Dembelé, Antoine Griezmann, Philippe Coutinho et Malcom sont tous catalogués comme des flops. Entre-temps, Neymar est parti au PSG et Luis Enrique a été autorisé à quitter son poste d'entraîneur.

La Masia, quant à elle, est restée silencieuse. Bien que Sergi Roberto se soit frayé un chemin dans l'équipe première - et ait par la suite marqué l'un des buts les plus importants de l'histoire du club - ce fut une période de vaches maigres. En l'absence d'un vivier de talents, le Barça continue de dépenser sans compter. En 2021, le plus célèbre des diplômés de La Masia, Messi, est contraint de quitter le club en raison de l'état désastreux de ses finances.

Pendant des années, le Barça a cherché dans ses rangs le prochain grand joueur. Avant même qu'il ne quitte le club, une obsession s'est développée pour trouver le prochain Messi qui mènerait le club vers la gloire.

Toutes les semaines, le Barça semblait avoir un nouveau prétendant. Bojan a été le premier, mais il a rapidement disparu des projecteurs. Giovani Dos Santos et Riqui Puig ont suivi, mais aucun n'a pu s'imposer sur la plus grande scène. Gerard Deulofeu a lui aussi vu sa carrière prometteuse dérailler brusquement. D'autres options ont même failli en plein décollage. Le jeune international japonais Take Kubo était plein de promesses, mais une transaction ratée l'a fait partir pour le Real Madrid. Xavi Simons - du nom de la légende du Barça - est parti pour le PSG après avoir reçu une offre alléchante pour rejoindre le club parisien.

Le fait d'être associé au grand Argentin est devenu une malédiction pour de nombreux joueurs, ce qui n'a fait qu'accentuer la pression sur la plus célèbre "usine" de football pour qu'elle recommence à produire.

Mais les choses ont changé sous la houlette de Ronald Koeman. L'entraîneur néerlandais a connu une période difficile en Catalogne. Ancien joueur du Barça, devenu un élément clé de la "dream team" de John Cruyff au début des années 1990, Koeman n'a jamais réussi à s'imposer en un peu plus d'une saison complète aux commandes de l'équipe. Il s'est publiquement brouillé avec Laporta, aujourd'hui redevenu président, qui a admis que le Batave n'était pas son premier choix pour le poste. Pourtant, malgré les relations tendues entre les deux hommes, Laporta est resté fidèle à son approche de la Masia et n'a cessé de faire l'éloge des talents du centre de formation au fur et à mesure qu'ils se développaient au sein de l'équipe.

Mais cela n'a pas suffi à sauver le poste de Koeman, qui a été licencié à la fin de l'année 2021. L'actuel sélectionneur des Pays-Bas ne restera pas dans les mémoires pour ses succès sur le terrain, mais son héritage s'est depuis amélioré grâce à certaines des décisions qu'il a prises en matière de l'équipe et de joueurs alignés. Privé de soutien financier, Koeman s'est tourné vers le centre de formation blaugrana. Il a fait d'Ansu Fati un élément essentiel de son équipe, a fait débuter Gavi et a confié à Pedri, une recrue de Las Palmas, des minutes de jeu importantes.

Le Barça n'a peut-être pas gagné grand-chose sous sa direction - et Koeman n'a pas trop protesté contre son licenciement - mais il a prouvé qu'il y avait encore de la vie dans le club.

Xavi n'a fait que poursuivre cet effort. Il a souffert des mêmes facteurs limitants que Koeman. Sans Messi et sans argent pour le remplacer, l'entraîneur a été contraint de faire preuve de créativité. L'ancien joueur de La Masia n'a eu d'autre choix que de se tourner vers la jeunesse. Gavi, Pedri, Ansu et Alejandro Baldé sont devenus des éléments clés de l'équipe, tandis que d'autres attendaient leur chance.

Cette saison, la jeunesse a joué un rôle encore plus important. Yamal s'est imposé comme le jeune talent le plus prometteur du football mondial et a joué en toute liberté malgré les comparaisons avec Messi qui ont perturbé ses débuts sous la tunique blaugrana. Fermin Lopez, lui aussi, s'est fait une place dans l'équipe, débordant d'énergie et d'activité dans les zones axiales. Cubarsi, le dernier arrivé, semble plus qu'à l'aise en défense centrale, comme en témoigne sa brillante prestation contre Kylian Mbappé et le PSG en Ligue des champions au début du mois d'avril.

Si l'on fait le bilan, on constate que l'entraîneur, qui va bientôt quitter le club, a permis à 15 joueurs de La Masia de faire leurs débuts en tant que professionnels. Son style n'est peut-être pas le retour de "l'ADN du Barça" promis par Xavi lors de sa conférence de presse d'introduction, mais il a fait sa part pour que le centre de formation retrouve ses lettres de noblesse.

Aujourd'hui, le Barça est confronté à la contrainte intimidante de faire face à la suite des événements. De l'autre côté du pays, le Real Madrid est de plus en plus fort. Son président Florentino Perez, qui ne lésine pas sur les moyens, a mis sur pied une équipe pleine de jeunes talents. Mbappé arrivera bientôt dans la capitale, Endrick aussi. Il est question qu'Alphonso Davies quitte le Bayern Munich. Le Barça ne peut pas continuer à dépenser autant, du moins pas pour l'instant.

Les choses deviennent encore plus difficiles avec l'incertitude qui règne en Catalogne au sujet de l'équipe dirigeante. Le club essaierait de convaincre Xavi de rester, fort d'une récente série de performances prometteuses après l'annonce de la démission de l'entraîneur. On a le sentiment que ce coach, qui a déjà fait gagner un titre au club, pourrait être le mieux placé pour cultiver la vague de jeunesse. Fin mars, le vice-président Rafa Yuste a qualifié le Barça de Xavi de "projet" et a admis qu'il "essaierait de le convaincre" de rester. Si le club est prêt à être patient, alors quelque chose pourrait fonctionner.

Le Barça se trouve donc dans une situation précaire. Il est certain qu'il tentera de faire quelques coups sur le marché pour tenter de remporter la Liga dans les années à venir. Laporta, avec ses leviers financiers, semble prêt à multiplier les pirouettes une fois de plus. Mais au milieu de tout cela, le Barça a enfin quelque chose sur quoi s'appuyer. Et si l'usine à talents continue de produire, il se pourrait bien que le temps passé loin du sommet soit plus court que prévu.