Garnacho social media GFXGetty/GOAL

Alliance avec Rashford, provocations sur les réseaux : comment Garnacho met sa carrière en danger

Il existe un art pour se faire des ennemis. Alejandro Garnacho semble en être passé maître. L'ailier de Manchester United, qui profite de ses vacances d'été tout en cherchant une nouvelle équipe sur les conseils de son coach Rúben Amorim, aurait pu faire profil bas. Il a délibérément choisi la controverse, provoquant les fans des Red Devils avec une publication Instagram pour le moins tapageuse. Le décor : une villa de luxe à Ibiza, entre une Ferrari et une Lamborghini. La tenue : un maillot d'Aston Villa, floqué au nom de Marcus Rashford. Lequel s'est empressé de commenter : « Mon frère ».

Le message ne pouvait être plus clair. Garnacho choisissait son camp : celui de Rashford, contre son entraîneur et son club. Il formait une alliance de parias, deux joueurs poussés vers la sortie du club qui les a formés. Il se posait, lui et Rashford (tous deux prolongés à prix d'or par United en 2023) en victimes du système.

Résultat ? Garnacho a non seulement réussi à s'aliéner une bonne partie des supporters de United, confirmant le sentiment grandissant que le club se passerait bien de son attitude capricieuse malgré son immense talent, mais il a aussi agité un chiffon rouge devant tous les clubs qui pourraient envisager de le recruter cet été et de lui offrir la porte de sortie d'Old Trafford qu'il réclame.

  • Les réseaux sociaux, son pire ennemi

    En ligne, la publication de Garnacho a provoqué un tollé chez les supporters de United. « Son ego est ridicule », pouvait-on lire sur X, tandis que d'autres le qualifiaient de « type bizarre ». Sur Reddit, un commentaire cinglant résumait le sentiment général : « Il étale un train de vie que le club lui a offert, tout en crachant sur ce même club et ses fans. Un ego démesuré, virez-le. » Un autre ajoutait : « C'est puéril, enfantin, et ça montre exactement pourquoi le coach veut le voir partir. S'il veut quitter le club, il peut le faire, la seule chose qui l'en empêche, c'est lui-même. » Un message a particulièrement visé juste : « Tellement stupide. Certains joueurs feraient mieux de ne pas avoir de réseaux sociaux. » Une remarque qui semble taillée sur mesure pour Garnacho. Car si sa carrière est encore courte, son historique de dérapages en ligne est déjà long.

    Ses activités numériques avaient déjà fait tiquer en 2023, quand il avait posté deux émojis gorille au-dessus d'une photo d'André Onana célébrant son arrêt sur penalty. Un post qui risquait d'être interprété comme raciste, même si Onana avait lui-même désamorcé la polémique. Garnacho avait rapidement supprimé sa publication et s'en était tiré avec une simple tape sur les doigts, évitant l'amende et la suspension qu'avaient subies Bernardo Silva ou Edinson Cavani par le passé. Mais la leçon n'a pas été retenue. Quelques mois plus tard, il « likait » une publication d'un fan critiquant la gestion d'Erik ten Hag. Un véritable coup de poignard dans le dos pour le coach qui lui avait donné sa chance. Là encore, il s'en était sorti après des excuses, Ten Hag déclarant : « Alejandro est un jeune joueur, il a beaucoup à apprendre. » Cinq mois plus tard à peine, il récidivait en aimant un autre post critiquant le Néerlandais, venant cette fois de Cristiano Ronaldo.

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  • Alejandro Garnacho Manchester United 2025Getty Images

    Le talent gâché par l'immaturité

    Ses erreurs de jugement se sont poursuivies à l'arrivée de Rúben Amorim. En décembre, pour le derby de Manchester, il était écarté du groupe en compagnie de Rashford en raison de leur mauvaise attitude à l'entraînement. Il avait pourtant réussi à réintégrer l'équipe peu après, Amorim louant même sa concentration retrouvée. Mais tous ces progrès ont été balayés d'un revers de main lorsque Garnacho a filé directement au vestiaire après avoir été remplacé contre Ipswich, alors que United était réduit à dix. Un caprice qui lui a coûté cher, puisqu'il a dû présenter ses excuses en payant un dîner à toute l'équipe. La goutte d'eau pour Amorim fut cependant sa réaction après avoir appris qu'il ne serait pas titulaire pour la finale de la Ligue Europa. Entre son interview d'après-match boudeuse et une publication de son frère, Roberto, accusant l'entraîneur de l'avoir sacrifié, la rupture était consommée.

    Deux jours plus tard, devant tout l'effectif, Amorim lançait à Garnacho qu'il ferait « mieux de prier » pour qu'un autre club veuille de lui, avant de l'écarter pour le dernier match de la saison contre Aston Villa. Sa petite amie, confirmant l'amour de la famille pour les confidences sur les réseaux sociaux, annonçait dans la foulée que ce serait son dernier match à Old Trafford. S'il est vrai que United voyait depuis longtemps en Garnacho une potentielle manne financière, c'est bien lui qui s'est mis à la porte, à force de commentaires malavisés et d'interviews déplacées. Son jeune frère Roberto n'a rien arrangé, s'épanchant à chaque défaite au point que certains journalistes ont cru, à tort, qu'il était son agent.

  • AFC Bournemouth v Manchester United FC - Premier LeagueGetty Images Sport

    Quand le succès monte à la tête

    Alejandro Garnacho est en réalité représenté par des agents espagnols, Carlos Cambeiro et Quique de Lucas. S'ils ont plutôt bien géré sa carrière jusqu'ici – il ne faut pas oublier qu'il n'a pas encore 21 ans –, ils se sont montrés incapables de maîtriser son utilisation des réseaux sociaux. Et cette obsession pour le buzz en ligne pourrait bien causer sa perte. On pense alors à cette phrase de Paul Scholes : « Arrête de parler sur les réseaux et commence à jouer. » Pourtant, Garnacho était une promesse excitante à ses débuts en 2022-2023, terminant sa saison avec cinq buts et cinq passes décisives, le plus souvent en sortie de banc. Lorsque GOAL lui avait consacré un portrait cette saison-là, le directeur de l'académie de United, Nick Cox, avait pris soin de préciser que Garnacho n'avait pas encore « percé », prévenant que le jeune homme de 18 ans avait encore « beaucoup de chemin à parcourir ».

    Il a ensuite conquis sa place de titulaire et marqué le But de la Saison en Premier League contre Everton, ainsi que l'ouverture du score en finale de la FA Cup face à Manchester City. Il bouclait cette campagne avec 10 buts et 7 passes décisives, une excellente base de lancement. La saison dernière fut sa plus prolifique avec 11 buts et 10 passes, mais quelques bémols s'imposent. Six de ses 21 contributions décisives ont eu lieu lors de deux matchs de Carabao Cup contre Barnsley et Leicester. En Premier League, il n'a marqué que six fois, dont la moitié contre des équipes reléguées. Il n'a pas progressé autant qu'il l'aurait dû, donnant l'impression d'être tombé dans le piège que redoutait Cox : croire qu'il était arrivé avant même d'avoir vraiment commencé.

  • Alejandro Garnacho Cristiano RonaldoGetty

    Ronaldo, un modèle à double tranchant

    Son premier but en Premier League, une réalisation victorieuse à la dernière minute contre Fulham, avait ravivé les souvenirs d'un but similaire de Cristiano Ronaldo au même endroit, en 2007. Quelques semaines plus tôt, c'est le quintuple Ballon d'Or qui lui avait offert son premier but en pro, sur la pelouse de la Real Sociedad. Ce n'est un secret pour personne : en grandissant à Madrid, Garnacho a toujours idolâtré CR7. Il a d'ailleurs imité toutes ses célébrations emblématiques, ce qui lui a parfois valu quelques moqueries, notamment de la part de ses coéquipiers en sélection argentine, et l'a mis dans une position délicate chaque fois que le débat "Messi vs Ronaldo" refait surface. Pourtant, même en faisant abstraction des caprices de Ronaldo lors de son second passage à United (son refus d'entrer en jeu ou son interview explosive avec Piers Morgan), il est difficile de trouver meilleur modèle en matière de réussite, de travail et de dépassement de soi.

  • Alejandro Garnacho Marcus RashfordGetty

    Rashford, le mauvais exemple à suivre

    Marcus Rashford, en revanche, n'est pas le modèle que Garnacho devrait imiter. L'international anglais a connu la meilleure saison de sa carrière en 2022-2023, la même année que l'éclosion de l'Argentin. Auteur de 30 buts, il avait décroché un contrat monumental, le plaçant parmi les plus hauts salaires du club. Mais il a enchaîné avec une saison catastrophique, inscrivant seulement huit buts toutes compétitions confondues et faisant surtout les gros titres pour ses frasques extra-sportives. Une sortie en boîte de nuit juste après la défaite dans le derby contre Manchester City, puis un entraînement manqué après une virée de deux jours dans les bars et clubs de Belfast. Conséquence : il a perdu sa place en sélection nationale, puis en club après une brouille avec Rúben Amorim.

    La cause de cette brouille ? Une sortie nocturne, deux jours avant une victoire à domicile contre Everton. L'opinion d'Amorim sur l'attaquant était alors si basse qu'il avait déclaré préférer aligner son entraîneur des gardiens de 63 ans en surpoids, Jorge Vital, plutôt que Rashford, en raison de l'effet que cela aurait sur le moral du groupe. Prêté à Aston Villa, Rashford a montré quelques signes de vie, mais on est loin de la renaissance annoncée. Blessé à la cuisse pour le sprint final, il n'a pour autant manqué aucun événement mondain, assistant à un combat de boxe au Tottenham Hotspur Stadium quelques jours seulement après avoir été déclaré forfait pour le reste de la saison.

  • GarnachoGetty

    Les actes, pas les posts

    Pendant ce temps, Rashford peine toujours à trouver un point de chute, les clubs étant refroidis par les 40 millions de livres (près de 47 M€) réclamés par United. Le déclin de sa carrière, juste au moment où elle semblait enfin décoller, est sans doute la raison principale de cette frilosité. Et le danger est bien là : les clubs intéressés par Garnacho, dont le prix avoisinerait les 60 millions de livres (environ 70 M€), pourraient être tout aussi rebutés par son attitude.

    Cette alliance sur les réseaux sociaux entre Garnacho et Rashford rappelle d'ailleurs une réponse intrigante d'Amorim après le coup de sang de l'Argentin contre Ipswich. Interrogé par un journaliste sur l'attitude de son joueur, le coach avait rétorqué : « Vous faites la comparaison avec Rashford. » Le journaliste n'avait rien fait de tel. Le fait qu'Amorim ait lui-même évoqué le nom de l'Anglais en disait long.

    Garnacho se dirige désormais vers la même porte de sortie que Rashford, et il n'a aucun intérêt à être rangé dans la même catégorie. En 2023, les deux joueurs semblaient promis à un avenir radieux à Manchester United. Aujourd'hui, ils sont sur le départ. Si Rashford n'atteindra probablement plus jamais les sommets, Garnacho, de six ans son cadet, a encore le temps d'exploiter pleinement son potentiel. Mais plus que jamais, il doit apprendre de ses erreurs et cesser de se forger une réputation où ses mots, surtout sur les réseaux sociaux, résonnent plus fort que ses actions sur le terrain.