France Women Valérie Gauvin

Féminines | Coupe du monde 2019 | Tactique, équipe-type, joueuses clés... Comment joue l'équipe de France ?

Il faudra un peu de temps, comme toujours, une ascension, des exploits, des coups de grâce et des renversements, mais tout porte à croire qu'il y aura un avant et un après. Et ça, c'est déjà une victoire. Parce que son Mondial se déroule en France, et parce que les hommes sont déjà sur le toit du monde depuis un an, l'équipe de France féminine a une formidable occasion de bouleverser les mœurs et choper les cœurs. Les filles de Corinne Diacre le savent : cette Coupe du monde accélère l'histoire.

Depuis deux ans, elles fignolent leurs forces et travaillent plusieurs axes avec une méthodologie claire pour entrer dans le vif du sujet. Philosophie de jeu, système, animation offensive, organisation défensive : voici tout ce qu'il faut savoir sur le jeu des Bleues avant le début de la fête.


RAPPEL DE LA LISTE DES 23


France Women
PosteJoueuses
GARDIENNES

Sarah Bouhaddi (Lyon), Pauline Peyraud-Magnin (Arsenal), Solène Durand (Guingamp).

DÉFENSEURES

Julie Debever (Guingamp), Sakina Karchaoui (Montpellier), Amel Majri (Lyon), Griedge Mbock Bathy (Lyon), Eve Périsset (PSG), Wendie Renard (Lyon), Marion Torrent (Montpellier), Aïssatou Tounkara (Atlético de Madrid)

MILIEUX DE TERRAIN

Charlotte Bilbault (Paris FC), Elise Bussaglia (Dijon), Grace Geyoro (PSG), Amandine Henry (Lyon), Maeva Clémaron (FC Fleury 91), Gaëtane Thiney (Paris FC)

ATTAQUANTES

Viviane Asseyi (Bordeaux), Delphine Cascarino (Lyon), Kadidiatou Diani (PSG), Valérie Gauvin (Montpellier), Emelyne Laurent (Guingamp), Eugénie Le Sommer (Lyon)


LE STYLE DE JEU 


Corinne Diacre France

La plus grande force de ce cru 2019 pour l'équipe de France féminine réside dans la variété de ses armes. Corinne Diacre n'a jamais renié son idée première : avoir une supériorité dans la maîtrise collective. Question de statut. Elle l'a démontré contre le Japon, par exemple, en avril dernier, et ses mots traduisaient ses aspirations : "On a eu la possession, on a bien fait circuler le ballon alors que le Japon aime avoir la possession et excelle dans le jeu court. C’est bien, on a été plus justes techniquement que contre l’Allemagne. On n’est pas très loin de la vérité...". Ne réduisons pourtant pas les Bleues à une équipe obnubilée par cette fameuse possession de balle. Sur leur saison internationale, depuis septembre 2018, elles tiennent le ballon dans des proportions notables (59,24%), mais ne sont pas les meilleures élèves en la matière. L'Argentine (68,01%) par exemple, mais aussi les Pays-Bas (61,66%), l'Espagne (60,42%), les États-Unis (59,24%) ou encore leur premier adversaire au menu, la Corée du Sud (60,81%) ont davantage confisqué le ballon dans leurs différents matches sur cette même période.

Créatives sur attaques placées, les Bleues sont aussi incisives sur attaques rapides. La diversité de leurs profils offensifs leur permet d'alterner des phases de préparation avec un jeu plus direct. La position du bloc est également variable, selon la problématique du jour. Les constantes ? Une recherche perpétuelle d'équilibre dans le quadrillage du terrain et la connivence technique des Lyonnaises (majoritaires dans le groupe). "Ma philosophie est défensive quand on n’a pas le ballon et offensive quand on l’a !", avait rappelé Corinne Diacre dans un entretien au Midi Libre peu après son arrivée. "Ça paraît simpliste mais je suis une ancienne défenseure. La première chose que j’ai mise en place c’est un socle défensif". Avec cette idée de réduire au maximum la marge d'insécurité, les Bleues peaufineront leur plan selon l'opposition. Si le style diffère, le mode opératoire pour avancer dans le tournoi est comparable à celui de Didier Deschamps.


LE SYSTÈME 


Depuis sa prise de fonction en 2017, Corinne Diacre privilégie un système en 4-2-3-1 où les circuits sont désormais bien rodés, avec des profils interchangeables à une majorité des postes. Sur les 11 matches de leur saison de préparation, les Bleues ont évolué à 9 reprises dans ce schéma. Cela n'a pas empêché la sélectionneuse d'innover, aussi, quand l'occasion s'est présentée. Au cœur de l'automne, contre l'Australie (2-0), l'équipe de France s'est ainsi présentée en 3-5-2. Un système à 3 défenseures et deux pistons qu'elle a retenté un mois plus tard, contre le Brésil, avec une organisation en 3-4-3.

PS Bleues

Le 4-2-3-1, système préférentiel de l'équipe de France féminine. 


LES JOUEUSES CLÉS 


Comme Didier Deschamps il y a un an, Corinne Diacre n'a pas hésité à trancher dans le vif pour la constitution de sa liste, répondant à la fois à l'appel des nécessités techniques et aux intérêts de la vie sociale, inhérente à une telle aventure, en vase clos. La jeunesse y est dominante. Dix joueuses du groupe sont âgées de 25 ans ou moins. A contrario, l'effectif ne compte que 5 trentenaires : quatre cadres au vécu précieux - dans 4 zones différentes - l'attaquante Eugénie Le Sommer (30 ans), les milieux Élise Bussaglia (33 ans) et Gaëtane Thiney (33 ans) et la gardienne Sarah Bouhaddi (32 ans), auxquelles s'ajoute la défenseure Julie Debever (31 ans).

Il y a les leaders de paroles, les leaders d'énergie, mais aussi et surtout les leaders techniques. La capitaine Amandine Henry coche toutes les cases. Elle constitue la colonne vertébrale de l'équipe avec la défenseure Wendie Renard - plus grand gabarit de la liste (1,87m) -, et la meneuse Gaëtane Thiney.

Au-delà de ce cercle de cadres bien défini, le groupe France a aussi su se renouveler dans son ère récente pour avoir des forces vives dans toutes les lignes, avec des joueuses qui arriveront bientôt au point culminant de leur carrière. Griedge Mbock (24 ans) est devenue incontournable en défense centrale. La Montpelliéraine Marion Torrent (27 ans), dont le volume de jeu et la qualité de centre sont remarquables, est la seule joueuse à avoir disputé les 11 matches de cette année de préparation. Son pendant côté gauche, Amel Majri (26 ans), capable de joueur au milieu ou derrière, aura elle aussi un rôle clé, tout comme les nouvelles sensations de la ligne offensive : Delphine Cascarino (22 ans) et Kadidiatou Diani (24 ans), deux attaquantes de percussion brillantes à l'approche du tournoi, et la buteuse Valérie Gauvin (23 ans), athlétique et clinique.

TOP 5 BUTEUSES 2018-19
1. Diani                  8 buts                 
2. Le Sommer  6 buts
3. Gauvin5 buts
4. Cascarino/Mbock 3 buts
5. Bussaglia2 buts
TOP 3 PASSEUSES 2018-19
1. Torrent           5 passes décisives     
2. Thiney          3 passes décisives
3. Mbock/Cascarino         2 passes décisives

TOP 3 DRIBBLEUSES 2018-19

1. Cascarino               20 dribbles réussis                 2. Diani           14 dribbles réussis              3. Majri      8 dribbles réussis        

Statistiques Opta. Période septembre 2018 - juin 2019 en équipe de France.


L'ANIMATION OFFENSIVE


France Women Valérie Gauvin

Deux joueuses occupent un rôle central dans la construction du jeu : Amandine Henry et Gaëtane Thiney. Si ces deux-là sont dans un bon jour, c'est toute l'expression collective de l'équipe de France qui gagne en fluidité. Mais le rôle des quatre défenseures est aussi considérable pour une équipe qui aime repartir de derrière. Avec les sorties de balle de la charnière Mbock-Renard et l'animation dans les couloirs de Torrent et Majri - les deux joueuses qui ont créé le plus d'occasions cette saison en équipe de France derrière Thiney - la ligne défensive de ce 4-2-3-1 est un socle.

L'idée de Corinne Diacre dans l'élaboration de sa liste consiste à miser sur les complicités (le contingent lyonnais) et les complémentarités. Deux concepts qui se marient bien dans un grand tournoi international. Comme pour l'équipe de France masculine, la multitude de profils augmente le champs des possibilités. Un constat toujours plus visible en attaque qu'ailleurs. Chargées de créer des brèches sur les côtés, Delphine Cascarino, pure dribbleuse, et Kadidiatou Diani, davantage dans l'accélération et la puissance, sont capables de faire des différences individuelles terribles. La Parisienne, que ses coéquipières perçoivent devant les caméras comme "la Mbappé de l'équipe" après son superbe but en solitaire contre la Chine (2-1), est apte à jouer à tous les postes de l'attaque. Dans l'axe, elle peut offrir une alternative à la goleador Valérie Gauvin, athlétique et moins fuyante, mais qui offre un bon point d'appui et ne reste pas fixe pour autant.

Eugénie Le Sommer a pour habitude d'amorcer ses actions côté gauche pour plonger dans l'axe, où sa qualité de frappe exceptionnelle fait des étincelles. Deuxième meilleure buteuse de l'histoire de l'équipe de France (74 pions), la Lyonnaise reste une référence absolue. Sa participation pour le match d'ouverture contre la Corée du Sud est incertaine, comme celles de ses coéquipières lyonnaises Amandine Henry et Amel Majri, toutes trois victimes de bobos de dernières minutes après une saison harassante dans le meilleur club du monde.


L'ORGANISATION DÉFENSIVE 


France Women Wendie Renard

Comme l'animation part de derrière, dans le même ordre d'idée, les attaquantes sont les premières garantes de l'équilibre défensif. Parce qu'elle est le dernier maillon de la chaîne, Valérie Gauvin n'a jamais caché son obsession pour le but, mais cela n'altère pas sa générosité dans le pressing, où elle est la première à compliquer la relance de l'adversaire par ses courses et son travail de sape. Gauvin est d'ailleurs l'une des joueuses qui gagnent le plus de duels en moyenne depuis un an, tout comme Amandine Henry (associée à Élise Bussaglia ou Charlotte Bilbault), aussi active à la récupération du ballon que dans son utilisation. Sur les ailes, Diani, Cascarino, Le Sommer ou Laurent ont également des charges précises dans le repli défensif pour compenser les montées des latérales. Il est question de paires dans une équipe, toujours. Et celle de la charnière centrale Mbock-Renard allie âpreté dans le duel et qualité d'anticipation.


LES COUPS DE PIED ARRÊTÉS


Les buts épiques de l'histoire du foot français ont souvent été inscrits sur coups de pied arrêtés. Cela tombe bien : l'équipe de Corinne Diacre se montre franchement performante dans l'exercice. Depuis dix mois, elle a inscrit 10 de ses 28 buts sur phases arrêtées - 5 sur corner, 1 sur coup-franc direct, 2 sur coup-franc indirect et 2 sur penalty - soit 28% du total, ce qui en fait l'une des nations majeures les plus redoutables dans le domaine. Les options ne manquent pas pour le choix des tireuses : Gaëtane Thiney, Elise Bussaglia ou Eugénie Le Sommer sur coup-franc direct, toutes réputées pour leur qualité de pied, ou encore Amel Majri sur corner, où le jeu de tête de Wendie Renard, Griedge Mbock et Valérie Gauvin est une évidence. On y verrait presque un dernier parallèle avec Didier Deschamps pour Corinne Diacre, elle qui avait murmuré du bout des lèvres, au début de l'histoire, qu'elle se verrait bien en "Aimé Jacquet féminin". "J’aimerais bien. Surtout que, très sincèrement, Aimé est pour moi quelqu’un qui compte beaucoup et que j’ai croisé sur différentes phases". Puisse-t-elle avoir la même étoile. Dans cette galaxie du sport français, à la fin, les grands destins se croisent et se relient.

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