Le PSV est un club traditionnellement réputé pour son superbe réseau de détection et sa politique de transfert astucieuse.
Les recrutements des superstars brésiliennes Romario en 1988 et Ronaldo six ans plus tard étaient sans doute le parfait exemple de leur capacité non seulement à repérer les meilleurs talents du monde entier, mais aussi à les intégrer au football européen.
Cependant, suite aux changements profonds de l'industrie du football liés à l'arrêt Bosman (15 décembre 1995) et à l'explosion des droits TV en dehors des Pays-Bas, l'Eredivisie est devenue une destination beaucoup moins attrayante à partir du milieu des années 1990.
Des joueurs tels que Neymar et Vinicius Jr. auraient certainement pu jouer à Eindhoven il y a 25 ans, mais Barcelone et le Real Madrid ont depuis fait en sorte que le PSV n'ose même plus aujourd'hui rêver d'attirer les meilleurs Brésiliens de cette décennie.
Les champions d'Europe 1988 ont peut-être célébré la signature de l'icône mexicaine Hirving Lozano en 2017, mais le rapide attaquant n'a pas encore atteint le même niveau que les phénomènes susmentionnés.
La prise de conscience que le PSV n'était plus en mesure de sécuriser les Romario et Ronaldo de ce monde les a amenés à reconsidérer leurs choix stratégiques à long terme. La priorité du club n'est plus de chercher à recruter les talents à l'extérieur du club. Au contraire, l'objectif est désormais de les former lui-même.
"Je pense que le centre de formation joue un rôle primordial pour les clubs néerlandais", déclare Mark van Bommel, l'entraîneur du PSV, à Goal et à Voetbalzone.
"Nous essayons de toujours améliorer notre académie. Nous travaillons sur un tout nouveau bâtiment pour le centre de formation."
"Bien sûr, les autres clubs ont beaucoup plus d’argent que nous, mais nous essayons de développer nos propres joueurs de la meilleure façon possible.
"Idéalement, nous voulons que le plus grand nombre de joueurs issus de l’académie intègrent l'équipe première. Ce serait parfait si toute l'équipe était composée de joueurs formés au club, mais ce n'est pas possible. Vous avez besoin d’un mélange cohérent de joueurs de différentes catégories d’âge et de différents styles de jeu."
L'homme à qui incombe la responsabilité d'assurer que l'académie du PSV délivre ses promesses s'appelle Ernest Faber. Né et élevé à Eindhoven, il a lui-même passé une longue période au sein de l'équipe première, avant de devenir entraîneur adjoint puis d'être nommé directeur de l'académie en juin 2018.
"Le PSV est comme une famille pour moi. J’ai commencé ici à 12 ans et j’ai maintenant 47 ans", témoigne Faber à propos de son club bien-aimé.
"J'étais jeune quand Romario et Ronaldo jouaient encore au PSV. Le club avait les moyens de signer de grandes stars à l'époque.
"Mais maintenant, il y a une telle différence au niveau des sommes d'argent qu'il faut dépenser pour recruter. Les montants sont trop élevés pour un club comme le PSV.
"Le processus consistant à porter l'académie au niveau supérieur a commencé réellement vers 2007 ou 2010. Le club a mis en place un programme et chaque responsable du centre de formation a successivement apporté de nouvelles améliorations."
Ce changement d'orientation s'est rapidement avéré rentable, quand un certain Memphis Depay a été promu de l'académie et fait ses débuts avec l'équipe première en 2011-12.
Le talentueux attaquant allait ensuite mener le PSV au titre en Eredivisie en 2014-15, remportant au passage le titre de meilleur buteur ainsi que le trophée de joueur de l'année. Logiquement, ces performances le conduiraient vers Manchester United, pour un transfert record de 30,6 millions de livres sterling (34 M€).

"Regardez des joueurs comme Memphis ou d'autres joueurs qui ont emprunté le même chemin", poursuit le directeur de l'académie du PSV.
"Ils jouent déjà en équipe première à l'âge de 16 ou 17 ans. Vous obtenez du temps de jeu, vous accumulez de l'expérience à un niveau élevé, vous vous battez pour le titre de champion national, vous jouez en Ligue des champions et vous disputez des finales de coupe.
"Vous avez l'espace pour vous développer. Vous avez besoin de cette expérience pour aller ensuite dans les championnats majeurs, car là-bas, vous êtes encore un jeune joueur, même à 23 ans."
Depuis le départ de Memphis, de plus en plus de "diplômés" de l’académie font désormais partie de l'équipe première. Jeroen Zoet, Jorrit Hendrix, Steven Bergwijn, Mohammed Ihattaren, Michal Sadilek ou encore Cody Gakpo ne sont que quelques-uns des titulaires du PSV à avoir gravi les échelons du centre de formation.
Au sein de ce groupe, Bergwijn semble aujourd'hui le plus proche de faire l'objet d'un gros transfert, après sa superbe saison 2018-19.
"Stevie est proche du niveau de Memphis en 2015", reconnaît Van Bommel.
"Il est toujours difficile de comparer les joueurs, mais si vous regardez leurs qualités, alors Memphis jouait plus ou moins dans au même poste.
"Il est possible qu'un club offre pour lui un montant proche de celui versé pour Memphis."
Un transfert estival signifierait la fin d’un séjour de huit ans au PSV pour le joueur de 21 ans. Il conserve d'excellents souvenirs de son passage au centre de formation du club, soulignant l’atmosphère chaleureuse qui y règne.
"Les choses sont vraiment très amicales et terre-à-terre ici", affirme Bergwijn.
“C’est un club très chaleureux et amical. Vous vous sentez tout de suite chez vous au PSV.
"C'était important pour moi et je pense que c'est important pour tout le monde."

Alors que Bergwijn faisait des allers-retours entre Eindhoven et Amsterdam dans sa jeunesse, Zoet, un autre diplômé de l'académie, a quitté sa ville natale, Veendam, pour vivre dans une famille d'accueil plus proche du PSV.
"C’était une grande étape dans ma carrière à l’époque", se souvient le gardien de but.
"J'ai quitté mon environnement habituel avec ma famille, mes amis et tout ce que vous avez construit là-bas. J'ai pris ma décision en me basant sur mon instinct. Et le PSV était le club qui m'a fait la meilleure impression.
"J'avais deux familles d'accueil différentes et je me sentais vraiment nostalgique lorsque j'étais avec la première. Mais je me suis vraiment senti chez moi après ça. Cela m'a vraiment semblé une deuxième maison.
"Le PSV m'a beaucoup soutenu. Ils ont évalué la situation et sont restés au courant l'évolution des choses. J'ai finalement opté pour une autre famille d'accueil et je pense que c'était la bonne décision. Cela m'a également aidé dans mon développement sur le terrain."
Alors que Zoet compte déjà plus de 200 apparitions en Eredivisie à son actif, le prometteur milieu de terrain Ihattaren ne fait que débuter sa carrière. Âgé de 17 ans, il est considéré comme l’un des plus gros talents à avoir foulé les pelouses du terrain d’entraînement du PSV, De Herdgang, ces dernières années.
En effet, il a déjà fait ses débuts en championnat néerlandais malgré son jeune âge, au grand bonheur de l'entraîneur des moins de 19 ans du club, Ruud van Nistelrooy.
"La façon dont il progresse est spectaculaire", s'enthousiasme l'ancien buteur de Manchester United.
"Je pensais qu'il allait avoir besoin d'au moins une saison pour se développer et s'habituer à son nouvel environnement, mais il a vraiment décollé comme une fusée.
"Il a un grand avenir devant lui. Mais aujourd'hui, il lui faut désormais faire les efforts quotidiens pour progresser et tirer le meilleur de lui-même, dans tous les aspects. Je pense que c’est son plus gros défi."
Pro ShotsPrésent au PSV depuis son plus jeune âge, Ihattaren tient à rendre au club le temps et les efforts investis pour l’amener là où il est aujourd'hui.
"J'ai toujours eu un plan clair en tête et je m'y tiens pour le moment", explique-t-il lorsqu'on l'interroge sur sa décision de décliner l'intérêt de clubs étrangers au profit d'une prolongation de contrat au PSV.
"Ma préférence a toujours été de rester au PSV, c’était la bonne chose à faire. Je veux devenir le joueur vedette du PSV le plus rapidement possible.
"Je veux devenir important pour le club, rendre les fans heureux et remporter le titre - plus d'une fois.
"Et au final, je voudrais faire l'objet d'un gros transfert. Mais je suis heureux au PSV pour le moment et je ne suis pas pressé de passer à autre chose."
Sur les traces d'Ihattaren, Bergwijn et Zoet, le jeune Américain Richie Ledezma ne peut encore que rêver à tout cela, à ce stade de sa carrière.
Le milieu de terrain créatif a pris la décision courageuse de quitter les États-Unis pour Eindhoven en janvier 2019 et a commencé sa carrière au PSV au sein de l'équipe U19.
"Richie apporte quelque chose de spécial, c’est pourquoi nous l’avons fait venir", explique Van Nistelrooy.
"Il fait la différence au milieu de terrain en analysant, en passant, en se déplaçant très rapidement ; il peut marquer et créer des occasions pour l'équipe. C'est un talent très prometteur, je suis vraiment content de travailler avec lui."
Quant à Ledezma, il reconnait lui-même que le déménagement à Eindhoven a été un choc culturel, mais il salue aussi le soutien du club pour l’aider à s’adapter à son nouvel environnement.
Getty Images"Le club m'a aidé à trouver une maison et m'aide en matière de nutrition, la nourriture, ce que je mange", confie Ledezma.
"Parce que j'étais un peu potelé quand je suis arrivé ici, je suppose. Ils m'ont tous appelé 'le gros' et d'autres choses, alors j'étais comme… cool… tu vois ?
"C'est vraiment différent des États-Unis. La quantité de nourriture que vous mangez ... Je pense que c'est vraiment un truc culturel, plus de McDonalds !"
Avec un certain nombre de joueurs issus de son centre de formation aujourd'hui parmi les plus convoités du continent, il serait facile pour le géant d’Eredivisie de penser qu’il a déjà atteint l'objectif qu'il s'était fixé il y a une dizaine d’années.
Cependant, le PSV n'a aucunement l'intention de se reposer sur ses lauriers. En août, il inaugurera à De Herdgang un tout nouveau bâtiment qui devrait aider encore davantage à développer ses plus grands talents.
"Nous avons beaucoup investi dans un bâtiment de haute technologie, avec les dernières innovations, pour soutenir et développer les joueurs encore plus et encore mieux que nous n’avons pu le faire jusqu'à aujourd'hui", affirme Faber.
"Tout est pris en charge pour les joueurs. Ils ont de beaux vêtements, de belles chaussures, tout est là dans le vestiaire. Tout est soigné."
Ce dernier investissement devrait renforcer encore leur réputation de club qui n'achète plus les plus grands talents de l'étranger, mais qui produit ses propres superstars.
Ronaldo n'est plus le joueur que les jeunes du PSV admirent. Cet honneur revient désormais à l’ancien enfant de l’académie et transfert record du club : Memphis Depay.
