João Felix à la croisée des chemins : l’exilé de Chelsea doit s’imposer à l’AC Milan sous peine de ne jamais réaliser son potentiel

Voilà six ans que João Felix a explosé sur la scène en inscrivant 20 buts lors de sa première saison professionnelle avec Benfica. Malheureusement, il n’a jamais réussi à répéter un tel exploit depuis.

Le tournant décisif de sa carrière fut sans doute son transfert raté à l’Atlético Madrid en 2019. Plusieurs clubs étaient sur les rangs, mais il a choisi celui qui correspondait le moins à son style de jeu décontracté. L’Atlético cherchait à remplacer Antoine Griezmann et pensait que Felix était l’homme idéal. Mais il est rapidement apparu que le Portugais n’adhérait pas à la philosophie de Diego Simeone, où les attaquants doivent être la première ligne de défense.

Certes, il y a eu des moments de gloire, notamment le titre de Liga remporté en 2020-21, mais ils ont été largement éclipsés par les bas. Simeone a fini par perdre toute confiance en Felix, un joueur qui a toujours admis avoir besoin de se sentir soutenu pour s’épanouir.

Dès son plus jeune âge, Felix avait déjà connu des déceptions. Il était passé par le FC Porto avant de quitter le club en 2014. "Ils ne croyaient pas en moi autant que moi", écrivait-il dans The Players' Tribune. "Ils ne me faisaient pas confiance sur le terrain... À Porto, j’ai perdu ma joie."

Ce fut la même chose à l’Atlético. Bien que doué comme Griezmann, Felix était loin d’être aussi travailleur. Simeone résumait parfaitement la situation : "Au-delà du talent, il faut de l’engagement. Quand un joueur comprend pourquoi il joue à l’Atlético, tout s’aligne."

Felix n’a jamais vraiment compris cette philosophie, et quand Simeone a réintégré Griezmann, le Portugais a perdu sa place au profit de celui qu’il était censé remplacer.

Avec Simeone fermement opposé à son maintien, l’Atlético a tenté de vendre leur transfert le plus coûteux, mais sans succès. Les contraintes financières étaient un facteur, mais le style de Felix aussi.

Il y a vingt ans, Felix aurait été un excellent trequartista, libre de toute responsabilité défensive et concentré sur la création et la finition. Mais ce rôle de numéro 10 n’existe plus vraiment aujourd’hui.

Les milieux offensifs modernes doivent presser sans relâche, une tâche loin d’être la spécialité de Felix. Peu agressif, peu athlétique, il s’épanouit mieux en soutien d’un attaquant dans un 4-4-2, une formation peu utilisée au haut niveau.

Mais Milan est prêt à tenter le pari, ce qui laisse entrevoir un espoir prudent quant à la réussite de Felix en Italie.

Zlatan Ibrahimovic a révélé que Milan avait pris cinq minutes pour accepter l’idée de recruter Felix, grâce à l’insistance de l’entraîneur Sergio Conceição. "Le coach le voulait vraiment", a confié Ibrahimovic.

Conceição a été honnête avec Felix : aucune garantie de temps de jeu, mais une certitude de le faire évoluer à son poste préféré, juste derrière l’avant-centre.

"C’est ce qui m’a convaincu de venir à Milan", a admis Felix lors de sa présentation. "Pour l’instant, je suis prêté jusqu’en juin. Mais je me sens bien ici, et si je peux rester, je le ferai."

Felix n’aurait pas pu mieux commencer son aventure à Milan, inscrivant un superbe but dès sa première apparition en Coppa Italia contre la Roma. Titulaire lors de son premier match de Serie A face à Empoli, il a montré de belles choses, alimentant l’espoir d’une attaque milanaise revitalisée avec Santiago Gimenez, Rafael Leão et Christian Pulisic.

Le Corriere dello Sport prédit déjà que Felix pourrait transformer une équipe en quête de régularité. Des comparaisons avec Kaká, son idole d’enfance, commencent même à apparaître.

Cependant, Milan doit rester prudent. Felix a déjà brillé par intermittence sans jamais confirmer sur la durée. Un prolongement de prêt semble pour l’instant plus probable qu’un transfert définitif.

L’avenir de Felix dépend de lui. Il semble heureux à Milan, bien intégré grâce à Conceição et à son compatriote Leão.

Mais les paroles ne suffisent plus. Felix a souvent vanté ses nouveaux départs : l’Atlético devait être "l’environnement parfait pour progresser", Barcelone un "rêve devenu réalité", et Chelsea "l’endroit idéal pour briller".

Ses déclarations sur Milan doivent donc être prises avec prudence. Cependant, avec des minutes régulières à son poste préféré, il a enfin l’opportunité de réaliser son potentiel.

Il affirme vouloir "marquer l’histoire" à Milan, mais son objectif premier devrait être de s’installer durablement à San Siro. Après six ans d’errance, João Felix doit enfin trouver un foyer.