Benjamin Sesko Man Utd GFXGetty/GOAL

Benjamin Sesko est-il le sauveur de Man United ou un nouveau flop à 80 M€ ?

L'histoire entre Manchester United et Benjamin Šeško est celle d'un rendez-vous manqué. À plusieurs reprises. Le club a repéré le joueur pour la première fois alors qu'il n'avait que 16 ans, et a même eu l'occasion de le recruter pour une somme dérisoire. Une occasion manquée. C'est le Red Bull Salzbourg qui a flairé le bon coup, signant l'adolescent slovène à l'été 2019 pour seulement 2,5 millions d'euros.

Lors du premier mercato d'Erik ten Hag en 2022, les Red Devils se sont de nouveau penchés sur son cas. Mais là encore, ils ont tiqué devant le prix, qui était alors passé à 24 millions d'euros. Au lieu de cela, Šeško a rejoint le RB Leipzig, tandis que United a préféré débourser près de 85 millions d'euros pour Rasmus Højlund l'année suivante.

Pour paraphraser Oscar Wilde, rater un attaquant prometteur une fois relève de la malchance ; le rater deux fois ressemble à de la négligence. Aujourd'hui, à la troisième tentative, Manchester United semble enfin déterminé à faire venir Šeško à Old Trafford. Le club a même organisé un voyage secret en Allemagne pour tenter de conclure l'affaire. Et, comme souvent avec United, ils s'apprêtent à payer le prix fort pour leurs hésitations passées. Leipzig devrait exiger au moins 80 millions d'euros pour le joueur de 22 ans, également suivi par Newcastle.

Pourtant, malgré le montant élevé et la crainte de répéter l'erreur commise avec Højlund en misant une fortune sur un "projet", une certaine excitation entoure l'arrivée potentielle de l'attaquant, qui viendrait compléter la nouvelle attaque de Rúben Amorim.

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    Le choix de la raison

    Benjamin Šeško a fait ses premiers pas dans sa ville natale de Radeče, mais c'est à peine adolescent qu'il a commencé à faire des vagues. Lors de la saison 2017-2018, il a inscrit la bagatelle de 59 buts en 23 matchs avec les U15 du NK Krško. Il a ensuite rejoint le NK Domžale, double champion de Slovénie, mais les plus grands clubs européens se sont vite manifestés. Manchester City, le Bayern Munich, l'Ajax, la Juventus, Dortmund... tous étaient sur les rangs. Manchester United aussi, qui a même formulé une offre d'environ 1,2 million d'euros pour le joueur alors âgé de 16 ans.

    Mais c'est Salzbourg, qui un an plus tôt avait mis la main sur un autre attaquant précoce et physiquement impressionnant nommé Erling Haaland, qui a su séduire Šeško et son entourage. « Les plus grands clubs d'Europe ont essayé de le recruter », déclarait à l'époque son agent. « L'intérêt était énorme. Si nous avions choisi l'argent, Benjamin serait parti en Angleterre ou en Italie. Mais nous avons préféré voir plus loin et opter pour le projet de Salzbourg. »

    Contrairement à Haaland, Šeško a été jugé trop jeune et trop brut pour intégrer directement l'équipe première. Pendant que le Norvégien empilait les buts en première division et en Ligue des Champions, le Slovène a été prêté à l'équipe réserve, le FC Liefering. La marche était haute, et il a d'abord peiné, n'inscrivant qu'un seul but lors de sa première saison. Mais il s'est vite adapté, pour en marquer 21 la saison suivante. Le projet était en marche.

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    L'éclosion d'un phénomène

    En juin 2021, au lendemain de son 18e anniversaire, Benjamin Šeško devient le plus jeune joueur de l'histoire de la Slovénie. Quatre mois plus tard, il en devient le plus jeune buteur. Cette même année, il est promu en équipe première à Salzbourg. Et à la fin de la saison, malgré un bilan modeste de cinq buts en championnat, il signe déjà un accord pour rejoindre Leipzig l'année suivante.

    Lors de sa dernière saison en Autriche, il fait exploser les compteurs, avec 16 buts et 4 passes décisives en championnat. Au moment de quitter le pays, il affiche une moyenne d'une contribution décisive (but ou passe) tous les deux matchs. Une progression fulgurante.

    Après une première saison d'adaptation à Leipzig, Šeško a soudainement trouvé son rythme de croisière. Il a terminé la saison dernière en trombe, marquant lors des sept dernières journées de Bundesliga. Il est ainsi devenu le plus jeune joueur de l'histoire du championnat allemand à réaliser une telle série. Une fin de saison canon qui a permis à Leipzig de décrocher une quatrième place qualificative pour la Ligue des Champions, et qui a définitivement rallumé l'intérêt des plus grands clubs.

  • Une saison en demi-teinte

    Cette fin de saison en boulet de canon a fait monter la pression autour de lui avant l'Euro 2024. Mais le tournoi fut une déception. Il n'a pas réussi à marquer le moindre but en quatre matchs et a manqué deux grosses occasions lors du huitième de finale contre le Portugal, que la Slovénie a finalement perdu aux tirs au but.

    De retour en club, sa deuxième saison à Leipzig a été faite de hauts et de bas. Il a bien inscrit des doublés contre la Juventus et Augsbourg, ainsi qu'un but sublime de l'extérieur du pied contre le Bayern Munich. Il a également délivré une passe décisive lors de la victoire 3-2 contre le Bayer Leverkusen, qui a mis fin à l'incroyable série d'invincibilité du champion en titre. Mais la saison s'est terminée sur une note amère : Leipzig a fini sixième et ne s'est pas qualifié pour une compétition européenne pour la première fois en neuf ans.

    Sur le plan personnel, la déception était aussi de mise. Il n'a marqué que 13 buts en championnat, soit un de moins que la saison précédente, alors qu'il a débuté 13 matchs de plus. Malgré cela, tout le monde s'attendait à ce qu'il fasse l'objet d'un transfert retentissant cet été. Arsenal semblait en pole position, mais a finalement jeté son dévolu sur Viktor Gyökeres, laissant Manchester United et Newcastle se battre pour sa signature. Les Red Devils semblent avoir pris une longueur d'avance en entamant les discussions avec Leipzig et le joueur, désireux de compléter rapidement l'effectif de Rúben Amorim.

  • RB Leipzig v FC Bayern München - BundesligaGetty Images Sport

    Le profil d'un attaquant moderne

    Benjamin Šeško possède le physique idéal pour un avant-centre moderne. Du haut de son mètre 93, il allie une force physique impressionnante à une vitesse foudroyante. On se souvient qu'à ses débuts à Salzbourg, il avait été chronométré à la même vitesse de pointe que Kylian Mbappé. Cette combinaison de puissance et de rapidité en fait une menace constante dans les appels en profondeur.

    Mais il n'est pas qu'un simple athlète. Pour un joueur de sa taille, Šeško possède également une qualité de dribble remarquable. Sa frappe de balle est une autre de ses grandes forces, comme en témoigne le grand nombre de buts qu'il a inscrits de loin.

    C'est Christopher Vivell, l'homme qui l'a fait venir à Leipzig et qui pilote aujourd'hui le recrutement de Manchester United, qui en parle le mieux : « Il est extrêmement rapide, a une détente incroyable et est très fort de la tête. Benjamin est un vrai buteur qui, malgré sa taille, est mobile et techniquement doué. Ses qualités en font un joueur spécial, avec un profil unique. »

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    La marge de progression

    L'inconvénient, c'est que pour un joueur avec une telle réputation et un tel prix, Benjamin Šeško n'a pas encore prouvé qu'il était un buteur prolifique. La saison dernière, il n'était que le neuvième meilleur buteur de Bundesliga, avec cinq buts de moins qu'un joueur comme Jonathan Burkardt, qui a récemment quitté Mayence pour Francfort pour seulement 23 millions d'euros. De plus, malgré ses nombreux buts, Šeško a aussi la réputation de manquer des occasions importantes dans les grands moments, comme lors de l'Euro face au Portugal.

    Pour beaucoup de grands clubs, il reste un "projet", une star en puissance plutôt qu'un produit fini. Son prix élevé et ses exigences salariales en font donc un pari risqué pour des équipes qui veulent gagner tout de suite. C'est le sentiment qui a prévalu à Arsenal, qui a préféré investir sur Viktor Gyökeres et ses 68 buts en 66 matchs avec le Sporting, même si c'était dans un championnat moins compétitif. Manchester United, de son côté, semble prêt à prendre ce risque.

  • Erling HaalandGetty

    Dans l'ombre de Haaland et Zlatan

    À ses débuts à Salzbourg, la comparaison avec Erling Haaland était inévitable. Une comparaison que Šeško a toujours accueillie avec enthousiasme. « De telles comparaisons me motivent et me donnent de l'énergie », déclarait-il à l'époque. « Ce n'est pas une pression. J'écoute et j'apprends pour pouvoir être encore meilleur que lui. Mes coéquipiers me disent que Haaland et moi sommes très similaires, surtout en termes de vitesse. La plupart me disent même que je suis meilleur que lui ! »

    Plus grand de quelques centimètres que le Norvégien, il partage avec lui cette capacité à marquer des deux pieds et à prendre la profondeur. Et si l'on se demande d'où lui vient cette confiance en lui, il suffit de regarder du côté de son idole de jeunesse.

    « Mon idole, c'était Zlatan Ibrahimović », a-t-il confié au Guardian en 2023. « Je ne dis pas que je joue comme lui, mais il s'amusait, il profitait sur le terrain, il faisait ce qu'il voulait. Ça me rend vraiment heureux de voir ce genre de joueur. Je regardais toutes les vidéos que je pouvais trouver sur lui. » Un mélange d'Haaland pour l'efficacité et de Zlatan pour la personnalité : le cocktail pourrait être détonant.

  • RB Leipzig v FC Bayern München - BundesligaGetty Images Sport

    Le grand saut dans l'inconnu

    Sa relation passée avec Christopher Vivell donne à Manchester United un avantage sur Newcastle dans les négociations. Cependant, les Magpies ont deux atouts de taille : ils peuvent lui offrir la Ligue des Champions et disposent d'une plus grande puissance financière, surtout s'ils vendent Alexander Isak à Liverpool.

    Si Šeško finit par signer à Old Trafford, il sera sous une pression immense dès le premier jour. Les supporters craindront de voir en lui un nouvel Højlund, qui a attendu quatre mois pour marquer son premier but en Premier League et a connu une terrible disette la saison dernière. Son arrivée faciliterait d'ailleurs probablement le départ du Danois.

    Šeško serait l'avant-centre numéro un, même s'il pourrait faire face à la concurrence de Bryan Mbeumo ou Matheus Cunha si Rúben Amorim décide de faire jouer Bruno Fernandes plus haut sur le terrain. Il devra faire face à un examen minutieux qu'il n'a jamais connu, mais il aura aussi la scène dont il a toujours rêvé. Il devra être aussi sûr de lui que ses idoles, Haaland et Ibrahimović, pour ne pas connaître le même sort qu'Højlund, lui aussi arrivé pour une fortune avec une expérience limitée.

    Il y a cependant une différence clé entre la situation dans laquelle Højlund est arrivé et celle que trouvera Šeško. Le Danois devait à lui seul ranimer une attaque en berne. Šeško, lui, sera l'une des trois pièces d'une attaque entièrement neuve, assemblée pour plus de 230 millions d'euros. Le fardeau sera partagé entre lui, Mbeumo et Cunha. Et si les choses tournent bien, il aura sa part du gâteau.